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L’immigration massive n’est plus un tabou au Canada, même pour la gauche

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Nous avons tous notre opinion sur la politique d’immigration massive des libéraux, mais il semblerait qu’il commence à se dégager un consensus pancanadien sur la question. Faisons le tour de quelques faits intéressants sur l’opinion publique au Québec et au Canada, et comment la critique de l’immigration massive rejoint également la gauche.

Louis T est un humoriste ayant un certain penchant idéologique. On ne peut pas l’accuser d’être un « réactionnaire d’extrême droite ». Celui-ci, dans une publication Facebook, utilise certains vieux arguments contre l’immigration (par exemple l’Islam ou les voleurs de « jobs ») pour railler ces critiques, mais il pointe que l’on a pas pointé jusqu’à récemment les conséquences actuelles de l’immigration, soit la pression sur le logement, l’inflation et la baisse du PIB par habitant.

C’est intéressant, car la gauche qui critiquait jadis quiconque osant dénoncer l’immigration massive se voit obligée de revoir son logiciel mental. D’ailleurs, les Verts de l’Île-du-Prince-Édouard sont le premier parti vert au Canada à remettre ouvertement en question ce tabou parmi la gauche. C’est ironique, car la gauche actuelle, qui souhaite plus de programmes sociaux, est en faveur de politiques qui défavorisent les travailleurs et mettent une pression monstre sur les services publics qu’ils prétendent vouloir renforcer.

Le Canada n’est pas un cas unique. Les Danois furent également obligés de revoir leur logiciel social-démocrate. Pour partager la richesse, il faut limiter le nombre de nouveaux bénéficiaires des services sociaux, des allocations. Ils ont compris qu’ils ne pouvaient pas partager un gâteau quand il y a toujours plus de nouveaux arrivants pour y prendre une portion.

Une théorie sur la faiblesse de l’État-providence aux États-Unis, au-delà du libéralisme de la constitution, serait que les blancs ne veulent pas partager avec les autres communautés, qui sont plus nombreuses qu’eux statistiquement à demander l’aide de l’État. Ce qui fait dire qu’un État, plus il est diversifié, moins il est en faveur du partage de la richesse. C’est en gros du chacun pour soi, ou à la rigueur, ma communauté avant les autres.

Le Québec, avec sa tradition sociale-démocrate, se doit de limiter l’immigration de masse s’il veut préserver son modèle social. De même, pour garder les logements abordables, il faut éviter de faire rentrer toujours plus de gens. Il y a quelques années à peine, il y avait un surplus de logements disponibles. Il était possible de négocier son bail, car nous avions l’embarras du choix. Ce qui probablement ne faisait pas l’affaire des associations de propriétaires. Ceux-ci, avec une partie du patronat canadien, ont exigé toujours plus d’immigrants pour combler une « pénurie de main-d’œuvre », que l’on constate avec le recul qu’elle était vraiment dramatisée.

Lorsque Jean Charest est arrivé au pouvoir en 2003, il a choisi d’augmenter les seuils d’immigration de 35 000 à 50 000. Au nom justement de la pénurie de main-d’œuvre. Or, pour quiconque ayant travaillé à l’époque, il sait que trouver un emploi était difficile, et que même le plus banal poste d’emballeur chez IGA attirait de nombreux candidats. Depuis une vingtaine d’années, c’est ainsi que la population du Québec a augmenté de près d’un million de personnes. Ce qui nous fait poser la question : est-ce que ce million de nouveaux habitants a aidé en partie à combler la « pénurie de main-d’œuvre »?

Bien évidemment, pas du tout. Certains secteurs sont même particulièrement touchés par cette arrivée massive d’immigrants. L’éducation, la santé, les services publics doivent composer avec un afflux massif de nouveaux bénéficiaires, mais bien peu travaillent dans ces domaines (sauf peut-être dans les hôpitaux). Les classes débordent, les élèves ont de plus en plus de mal à acquérir un niveau acceptable en français, et pour plusieurs enfants provenant de pays en guerre, ceux-ci doivent gérer des traumatismes. C’est dans ce contexte dégradé que les enseignants doivent garder la tête hors de l’eau.

François Legault disait avant son virage complet sur la question qu’il fallait mieux « prendre moins d’immigrants, mais en prendre soin ». Sur YouTube, de nombreux Néo-Canadiens expliquent leur choix de quitter le pays après quelques années. Les raisons évoquées : un marché de l’emploi stagnant, un système de santé peu efficace, des logements hors de prix.

Les prix dans les régions métropolitaines, et même en dehors de grands centres sont tels qu’il est maintenant impossible de mettre de l’argent de côté. L’immigrant pouvait améliorer sa vie en travaillant quelques années avec des proches pour mettre assez de côté pour devenir propriétaire de sa maison ou de son commerce. Cela n’est presque plus possible aujourd’hui.

C’est ainsi que le Canada anglais, jusqu’à présent réfractaire à toute critique en public de l’immigration massive, doit revoir ses dogmes. Il s’agit de lire les éditoriaux des journaux de Toronto, Winnipeg, Montréal et Calgary pour se rendre compte que l’opinion sur l’immigration massive a changé radicalement. Même le très libéral Globe and Mail critique ouvertement la politique du gouvernement qui a augmenté drastiquement le prix du logement.

Un consensus sur une question au Canada est rare, pour des raisons historiques. Les Québécois sont reconnus pour être mal à l’aise face à l’immigration massive, car celle-ci fut utilisée trop souvent dans l’histoire pour tenter d’assimiler les Québécois. Nous nous souvenons tous des propos de Lord Durham dans son célèbre rapport suite à la rébellion des patriotes. Jusqu’à récemment, le Canada anglais ne pouvait officiellement qu’être en faveur de l’immigration massive, car c’était une façon de se distinguer des Québécois « intolérants ».

Mais voilà que les conditions matérielles ont changé. Même les libéraux sont obligés de mettre (un peu) d’eau dans leur vin en exigeant le double du montant que les étudiants étrangers doivent prouver qu’ils ont sur leur compte de banque avant de venir ici. Les libéraux reconnaissent également du bout des lèvres que des abus ont eu lieu avec les faux collèges dans des tours à bureaux anonymes offrant des diplômes bidons aux étudiants indiens pour qu’ils puissent obtenir plus facilement la résidence permanente.

Critiquer l’immigration massive, ce n’est pas critiquer les individus. Ceux-ci sont des humains qui tentent d’améliorer leur vie et qui cherchent des opportunités pour le faire. La politique des libéraux, d’en prendre environ un million par année, est tout sauf raisonnable et humaine. Les travailleurs temporaires sont exploités dans des contrats fermés, à travailler dans des secteurs qui devraient tout bonnement disparaître à défaut d’offrir de meilleures conditions. Abattoirs, restaurants rapides, « shops » infernales aux conditions dangereuses. Le patronat devrait penser à investir dans la robotique, l’intelligence artificielle et dans la qualité de ses travailleurs au lieu de toujours aller chercher des gens prêts à faire ces emplois ingrats au salaire minimum.

Quant aux autres qui sont des résidents permanents, ils sont soumis comme n’importe qui aux aléas de la crise du logement, de l’inflation. L’emploi est de plus en plus difficile à trouver. Et rien n’indique qu’avec le déluge qui s’en vient avec l’intelligence artificielle, le chômage n’augmentera pas en flèche, même dans les emplois que l’on pensait protégés. Les Québécois comme les Canadiens font bien de mettre de la pression sur nos gouvernements pour que l’on ait moins d’immigrants, et surtout que ceux-ci ne sont pas là simplement pour combler de mauvais emplois. Car nous en payions tous le prix, que l’on soit Québécois, Canadien, autochtone ou un immigrant arrivé ici depuis peu.

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