D’après un article de Tristin Hopper publié sur le site du National Post le 3 juin 2025
Dans un rapport au ton inhabituellement critique, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) met en cause la gestion canadienne de l’immigration massive survenue après la pandémie de COVID-19. Selon les économistes de l’OCDE, cette politique aurait contribué à l’effondrement de l’accessibilité au logement, à la stagnation de la productivité et à une illusion de croissance économique alimentée par l’expansion démographique.
Tristin Hopper rapporte que l’étude, publiée la semaine précédente, constitue le portrait économique biennal de l’OCDE sur le Canada. Elle met en lumière deux faiblesses majeures du pays : l’accessibilité au logement et la faible productivité du travail, deux domaines où le Canada figure parmi les plus mauvais élèves du monde développé.
Le rapport pointe du doigt un facteur principal : l’immigration record. « La croissance rapide de la population a exacerbé les difficultés préexistantes d’accessibilité au logement », écrivent les auteurs, recommandant sans ambages que « l’offre de logements soit synchronisée avec les cibles d’immigration ».
L’OCDE observe que cette arrivée massive de nouveaux travailleurs ne s’est pas accompagnée d’investissements suffisants pour améliorer la productivité. Résultat : le gâteau économique ne grossit pas, et la part revenant à chaque travailleur diminue. Le rapport note également que le profil des migrants a changé : le Canada accueillait autrefois majoritairement des professionnels qualifiés (médecins, ingénieurs), mais la majorité des nouveaux arrivants sont désormais des étudiants ou des travailleurs temporaires, souvent peu qualifiés. « La composition des compétences a probablement réduit la productivité moyenne du travail », constate l’OCDE.
En matière de logement, les statistiques de l’organisation confirment la position marginale du Canada. Son ratio prix/revenu pour l’immobilier est le plus élevé de tous les pays membres, à l’exception du Portugal. Côté croissance du PIB par habitant, le Canada se classe aussi parmi les pires performances. Entre 2014 et 2022, seule la croissance du Luxembourg et du Mexique a été plus faible. En moyenne, la richesse individuelle des Canadiens n’a crû que de 0,6 % par an sur cette période.
Tristin Hopper souligne que, selon l’OCDE, cette apparente croissance économique nationale est en réalité une illusion créée par l’arrivée massive de nouveaux consommateurs. Entre le début de 2022 et 2024, la population canadienne est passée de 38,5 à 41,6 millions — une augmentation de plus de trois millions de personnes en deux ans. À titre de comparaison, la croissance moyenne de la population dans les pays de l’OCDE en 2023 était de seulement 0,5 %, soit six fois moins rapide.
Ce phénomène sans précédent de croissance démographique volontaire — en dehors des contextes de guerre ou de crise humanitaire — donne l’impression d’une économie en expansion alors que, par habitant, les Canadiens s’appauvrissent. Le rapport met d’ailleurs cette réalité en évidence à travers deux graphiques opposés : en PIB total, le Canada suit la moyenne de l’OCDE, mais en PIB par habitant, il chute sévèrement.
Face à ce constat, le premier ministre Mark Carney reconnaît que la faible productivité nuit au pouvoir d’achat. Il propose d’abattre les barrières au commerce intérieur et de lancer de grands projets d’infrastructure. Toutefois, Hopper rappelle que plusieurs freins à l’investissement dans les ressources naturelles, hérités de l’ère Trudeau, sont toujours en place, au grand dam de certains gouvernements provinciaux comme celui de l’Alberta.
L’OCDE note que le gouvernement canadien a commencé à revoir ses ambitions migratoires à la baisse. Pourtant, les nouvelles cibles pour 2025 restent largement au-dessus des niveaux d’avant la pandémie : plus d’un million de nouveaux arrivants sont prévus, incluant 395 000 résidents permanents, 305 900 étudiants internationaux et 367 750 travailleurs temporaires.
Le rapport conclut sur une note nuancée : malgré ses faiblesses structurelles, l’économie canadienne demeure « résiliente » et appuyée par des finances publiques solides. Mais il s’agit aussi de l’une des premières critiques aussi claires, émanant d’un organisme international, de la trajectoire suivie par Ottawa depuis la crise sanitaire.