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Loïc Tassé : quand la haine pousse à la désinformation

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Avec le début de l’année électorale aux États-Unis, la course à la détestation de Trump et à l’anti-américanisme primaire est lancée. Pendant des mois, nous aurons droit aux complaintes délirantes et paranoïaques de nos chroniqueurs d’ici, qui s’érigeront en rempart contre le populisme disruptif du magnat de l’immobilier devenu politicien. Sans réaliser leur dissonance cognitive, même les plus anti-woke ne pourront succomber à l’envie de planter le monstre orange.

C’est ainsi que dans un texte d’opinion absolument lunaire intitulé Trump: un cirque destiné aux analphabètes, le chroniqueur du Journal de Montréal Loïc Tassé a récemment fait plusieurs affirmations pour le moins douteuses.

D’une manière générale dans le seul paragraphe raisonnable du texte, il explique la montée de Trump par les « lubies intersectionnelles » de la gauche américaine et l’incapacité des dirigeants à juguler la crise migratoire.

Il ajoute cependant que la popularité de Trump s’explique aussi par « le racisme d’une partie de la population américaine face à la minorisation des Blancs prévue autour de 2040 », sans parler, évidemment, de la montée vertigineuse du racisme anti-blanc et des troubles sociaux entourant des organisations comme Black Lives Matters, d’où émane la majorité des discours haineux de nature raciale en 2024.

Il affirme ensuite que Donald Trump « montre des signes de début de démence sénile ». Ce qui est particulièrement ironique considérant les trois dernières années passées à tenter de faire du sens des déclarations fragmentaires et confuses de Joe Biden.

Mais il prétend surtout que les Américains sont des analphabètes débiles et que c’est pour cette raison qu’ils appuient Trump. 

Déjà, on pourrait lui rétorquer qu’ils ne sont pas plus analphabètes qu’en 2020, quand ils ont voté Biden. De plus, les classes éduquées ont leurs propres tares, comme le wokisme et les « lubies intersectionnelles » susmentionnées.

Mais le plus gros problème de cette chronique, ce sont les statistiques qu’il donne pour appuyer sa thèse. Elles sont tout bonnement farfelues :

Analphabétisme élevé

Un des facteurs les plus sous-estimés qui favorise le soutien à Trump est le taux élevé d’analphabétisme. Environ 21% des Américains sont incapables de lire et d’écrire. 54% des Américains ont un niveau de compréhension de la langue anglaise équivalent à celui d’élèves de sixième année ou moins.

En d’autres termes, seuls 46% des Américains sont susceptibles de posséder une maîtrise suffisante de la langue pour bien comprendre les paroles de Trump.

Étonnamment, 77% des Noirs américains possèdent un niveau de compréhension des textes de modéré à élevé. Ce niveau tombe à 66% chez les Hispaniques et à 65% chez les Blancs.

Cancres à l’échelle mondiale

À l’échelle mondiale, les États-Unis se classent loin derrière le Canada et les pays européens qui ont des taux d’alphabétisme proches de 99%. Le taux d’alphabétisme américain le place au niveau de pays comme l’Irak, la Tunisie ou le Congo.

Il se trompe clairement quand il compare le taux d’alphabétisme des États-Unis à celui du Congo. Selon le rapport du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) en 2018 et le World Factbook de la CIA en 2015, le taux d’alphabétisation aux États-Unis était d’au moins 99,04%, soit légèrement plus qu’en France, au Japon ou en Suède et environ 4 points de pourcentage de plus qu’au Portugal. Au Congo, ce taux était de 67% (République Démocratique du Congo) ou 81% (République du Congo). Quant à la population irakienne, elle était alphabétisée à 78%.

Tassé voulait probablement parler du taux d’analphabétisme fonctionnel. Mais encore là, le niveau américain de littératie, sans être glorieux, est à peine plus bas que le niveau français et nettement supérieur à l’Espagne et à l’Italie. Bref, on est certainement à cent lieues du (ou des) Congo(s) et de l’Irak, et la comparaison est complètement erronée (voire malhonnête).

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Données sur l’analphabétisme fonctionnel, paru dans le magazine l’Actualité en 2017.

Quant à son affirmation voulant que les Noirs possèdent un meilleur niveau de compréhension des textes que les Blancs aux États-Unis, c’est encore une fois totalement faux.

Selon le Program for the International Assesment of Adult Competencies (PIAAC), le niveau de littératie des adultes américains de race blanche est clairement supérieur à celui des Noirs et des Latinos.

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Or, les Blancs votent majoritairement Républicain, alors que les Noirs et les Latinos votent majoritairement pour le Parti démocrate. L’argument central de Tassé s’en trouve invalidé : non, l’électorat de Trump n’est pas l’électorat le plus illettré qui soit aux États-Unis.

Tassé semble en fait avoir tiré l’entièreté de ses données d’un site peu fiable, qui se contredit d’une phrase à l’autre. Par exemple, l’auteur affirme que le Massachusetts a le meilleur taux de littératie infantile aux État-Unis, avant d’affirmer qu’il fait partie des trois pires États un peu plus loin.

Loïc Tassé a de réelles qualités, et il a parfois des choses intéressantes à dire sur l’immigration massive, la menace chinoise ou même l’islamo-gauchisme. Malheureusement, sa haine envers Donald Trump et ses électeurs le pousse à raconter n’importe quoi dès qu’il est question de politique américaine. On s’attendrait à mieux de la part d’un chroniqueur supposément sérieux, spécialisé en relations internationales, dont les textes sont publiés dans le quotidien le plus lu au Québec, et dont le salaire est en partie payé par les contribuables.

Mais la haine de Trump ne s’est pas dissipée depuis 2016 et les journalistes continuent de s’enliser dans cette croisade malhonnête et stérile, risquant jusqu’à leur intégrité intellectuelle. Tous les coups sont permis et en voulant contrer les discours soi-disant « toxiques » du controversé politicien américain, ils se retrouvent eux-même à faire de la désinformation.

S’il est tant préoccupé par l’intelligence et l’éducation des gens, Loïc Tassé devrait corriger son article et présenter ses excuses aux lecteurs qu’il a induits en erreur.

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