Le nouveau premier ministre du Canada, Mark Carney, doit, selon les médias, déclencher des élections très bientôt. Mais est-ce réellement dans son intérêt? Car il faut dire que le premier ministre non élu traîne un sérieux déficit de légitimité démocratique, en plus des casseroles laissées par Justin Trudeau.
Des élections seraient pour lui l’occasion de battre le fer tant qu’il est encore chaud, mais cela pourrait également se retourner contre lui s’il ne parvient pas à convaincre la population qu’il représente un véritable changement.
Mark Carney n’est pas un politicien charismatique. Ce serait même un euphémisme de le dire. Il a donc tout intérêt à déclencher des élections le plus tôt possible avant que son image ne s’effrite sous le poids de la réalité politique. Pourquoi? Parce que s’il reste trop longtemps en poste sans avoir été élu, sa légitimité fondra comme neige au soleil. Son manque de charisme, combiné à son profil de technocrate, pourrait rapidement devenir un handicap majeur.
Il doit aussi profiter de la campagne médiatique qui tente de le positionner comme une alternative crédible à Pierre Poilievre. Plus il attend, plus il devra assumer un bilan, aussi petit soit-il, et répondre aux critiques qui ne manqueront pas d’émerger au fil du temps. Il est plus facile de séduire l’électorat en jouant la carte du renouveau que lorsqu’on est perçu comme une simple continuité d’un gouvernement usé et impopulaire.
Carney devra aussi répondre à des critiques sur son rôle passé dans la gestion économique du Canada. Il aime se présenter comme un expert de la finance et un gestionnaire rigoureux, mais il ne pourra pas fuir son propre bilan. Justin Trudeau n’a pas tout fait seul. Qui faisait partie de son équipe économique et influençait les grandes orientations financières du pays? Mark Carney.
L’inflation galopante, la crise du logement, la perte de pouvoir d’achat, la pression fiscale sur la classe moyenne, toutes ces réalités qui frappent durement les Canadiens aujourd’hui sont le résultat direct de politiques auxquelles Carney a contribué, d’une façon ou d’une autre.
Il n’est pas nécessaire de rappeler à quel point Pierre Poilievre est désavantagé dans les médias. Pendant ce temps, Carney est présenté sous son meilleur jour, celui d’un économiste expérimenté qui comprend les rouages de l’économie.
Mais cette image flatteuse ne pourra pas tenir éternellement. Son profil de banquier, sa carrière internationale et ses liens avec des institutions financières puissantes pourraient jouer contre lui. Il est perçu comme un homme du système, un membre de l’élite déconnecté des réalités du citoyen moyen.
Les Canadiens devront choisir entre un banquier détenteur de trois passeports, qui représente la continuité d’un gouvernement ayant plongé le pays dans une crise économique et sociale, ou une opposition qui dénonce depuis des années la crise du coût de la vie et propose une rupture avec les politiques libérales.
Quant au Bloc Québécois et au NPD, ils devront se positionner comme de véritables partis d’opposition s’ils veulent éviter d’être perçus comme de simples alliés des libéraux.
Mark Carney sait que le temps ne joue pas en sa faveur. Plus il attend, plus il risque de s’enliser dans la réalité du pouvoir et de voir ses faiblesses exposées. Il lui faut agir rapidement pour éviter que la population ne réalise qu’il est, en fin de compte, un homme sans véritable ancrage politique, parachuté à la tête d’un gouvernement qui tente désespérément de sauver les meubles après l’ère Trudeau.
Les prochains mois seront décisifs. La question est simple : Mark Carney a-t-il vraiment ce qu’il faut pour affronter une campagne électorale? Rien n’est moins sûr.