Traduit de l’anglais. Texte de Catherine Lévesque publié sur le site du National Post le 28 mars 2025.
Le chef du Parti libéral, Mark Carney, est accusé d’avoir repris les idées d’autres personnes à son compte dans le cadre de la campagne électorale fédérale.
Ce n’est pas une première.
Le National Post a obtenu une copie de la thèse de Carney, soutenue en 1995 pour son doctorat en économie à l’Université d’Oxford et intitulée The Dynamic Advantage of Competition. Selon l’évaluation de trois universitaires, elle comporte 10 cas de plagiat manifeste.
Dans plusieurs sections de sa thèse, Carney a utilisé des citations entières, des paraphrases ou des passages légèrement modifiés provenant de quatre ouvrages antérieurs, sans mentionner ses sources ni les attribuer correctement.
«Il répète directement des passages sans guillemets. C’est ce qu’on appelle du plagiat», a déclaré Geoffrey Sigalet, professeur adjoint et membre du comité consultatif du président de l’Université de la Colombie-Britannique sur la discipline étudiante, qui traite notamment des cas de plagiat.
Le National Post a soumis les 10 exemples à l’équipe de campagne de Carney. Ce dernier a prêté serment en tant que premier ministre le 14 mars et est actuellement en campagne pour l’élection du 28 avril.
Dans un premier temps, la campagne de Carney a fourni une déclaration de son superviseur de thèse à Oxford.
«Je pense que vous déformez ce travail. En tant qu’universitaire depuis près de 40 ans, je ne vois aucune preuve de plagiat dans cette thèse ni aucune pratique académique inhabituelle», a affirmé l’économiste américaine Margaret Meyer, membre officiel du Nuffield College à Oxford.
«La thèse de Mark a été évaluée et approuvée par un comité universitaire qui l’a reconnue pour ce qu’elle est : une analyse impressionnante et approfondie qui le distinguait de ses pairs», a ajouté Meyer.
Or l’Université d’Oxford définit le plagiat comme :
«Présenter un travail ou des idées provenant d’une autre source comme étant les vôtres… en les incorporant à votre travail sans une reconnaissance complète.»
Un professeur, également diplômé d’Oxford, s’exprimant sous couvert d’anonymat par crainte d’être poursuivi en justice par Carney, a confirmé que les passages problématiques de la thèse du chef libéral correspondaient bien à cette définition.
« Les directives d’Oxford ne diffèrent pas de celles des autres universités », a-t-il déclaré.
« Lorsqu’un passage est repris mot pour mot d’une source, sans guillemets ni citation… c’est du plagiat », a-t-il ajouté.
Les administrateurs de l’Université d’Oxford ont également reçu les 10 exemples de plagiat présumé, mais n’ont pas répondu avant la date limite imposée par le National Post.
Jeudi soir, quelques heures après l’envoi de la déclaration de Meyer, une porte-parole de la campagne libérale, Isabella Orozco-Madison, a qualifié les accusations de plagiat de « caractérisation irresponsable » du travail de Carney.
Carney fait référence de manière extensive, dans sa thèse, au livre de Michael E. Porter The Competitive Advantage of Nations (1990). Cependant, il en duplique des passages et présente plusieurs phrases – parfois avec de légers ajustements – comme s’il s’agissait de ses propres écrits.
Dans un paragraphe de la page 206 de sa thèse, les similitudes sont particulièrement frappantes :
- Carney écrit : « Premièrement, l’intervention gouvernementale peut entraver la concurrence internationale et soutenir artificiellement les profits nationaux. »
- La phrase se retrouve presque mot pour mot dans l’ouvrage de Porter, page 797.
Carney n’a pas utilisé de guillemets ni ajouté de note de bas de page pour mentionner la source.
Meyer, son superviseur de thèse, a déclaré que « l’apparition de langage similaire est courante lorsqu’une source est fréquemment référencée dans un texte académique. »
« Par exemple, sur plus de 300 pages, le livre de Michael Porter est cité des dizaines de fois. Dans sa thèse, Mark l’a reconnu, cité, analysé et approfondi », a-t-elle affirmé.
Lors d’une récente entrevue avec CBC Toronto, Meyer a souligné que Carney avait terminé sa thèse « remarquablement vite », en moins de deux ans. Elle a également indiqué que cette thèse, qu’elle conserve dans son bureau, est « deux fois plus longue » que la sienne.
« Le fait qu’il ait pu assimiler plus de matière que la plupart des étudiants en un temps plus court et produire une thèse plus longue le distinguait clairement », a-t-elle déclaré.
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L’Université d’Oxford stipule sur son site web que le plagiat est « une affaire grave ».
« Les cas seront examinés et les sanctions peuvent aller d’une simple réduction de notes à l’expulsion de l’université, en fonction de la gravité de l’infraction. Même si le plagiat est involontaire, il peut entraîner une pénalité. »
Après son doctorat, Carney a mené une carrière prestigieuse : il a été embauché par la banque d’investissement Goldman Sachs, a occupé un poste haut placé au ministère des Finances, puis a été gouverneur de la Banque du Canada et de la Banque d’Angleterre, avant de devenir président de Brookfield Asset Management. Il a été nommé premier ministre après avoir remporté haut la main la course à la direction du Parti libéral.
Toutefois, un statut social élevé n’a pas empêché d’autres personnalités de perdre leurs diplômes universitaires. Ces dernières années, plusieurs ministres européens ont dû démissionner après avoir été accusés de plagiat ou avoir vu leurs titres académiques révoqués.
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