Vaclav Smil, professeur émérite à l’Université du Manitoba et expert reconnu en énergie, remet en question la faisabilité des objectifs de neutralité carbone d’ici 2050. Dans un article coécrit avec Elmira Aliakbari pour le Fraser Institute, il souligne que malgré les engagements internationaux et les investissements massifs, la consommation mondiale de combustibles fossiles a augmenté de 55 % depuis 1997, représentant encore 82 % de l’énergie primaire en 2022 .
Smil rappelle que les transitions énergétiques sont des processus longs et complexes. Par exemple, il a fallu plus d’un siècle pour passer du bois au charbon, puis au pétrole. La transition actuelle nécessiterait de remplacer environ 400 exajoules d’énergie fossile par des sources non carbonées d’ici 2050, ce qui équivaut à construire environ 22 000 projets de la taille du barrage de Site C en Colombie-Britannique.
Il met également en évidence les défis liés à la dépendance des industries lourdes aux combustibles fossiles, l’insuffisance des infrastructures énergétiques actuelles, la rareté des minéraux nécessaires pour les technologies renouvelables, et les coûts économiques élevés. Par exemple, une transition complète nécessiterait des investissements équivalents à 20-25 % du PIB annuel des pays développés.
Enfin, Smil souligne que la coordination mondiale est essentielle mais difficile à réaliser, étant donné les intérêts divergents des pays. Alors que l’Union européenne et les États-Unis réduisent leurs émissions, la Chine et l’Inde continuent d’augmenter leur consommation de charbon, et des pays comme la Russie dépendent fortement des exportations de combustibles fossiles.
Réception critique de l’ouvrage « 2050. Pourquoi un monde sans carbone est presque impossible »
Dans son livre 2050. Pourquoi un monde sans carbone est presque impossible (Arpa, 2025), Vaclav Smil approfondit son analyse sur les défis de la transition énergétique. Il y démontre que remplacer l’ensemble des infrastructures actuelles — véhicules, chaudières, avions, navires — par des alternatives décarbonées en seulement 25 ans est une tâche titanesque. Par exemple, il faudrait remplacer 1,5 milliard de véhicules à essence ou diesel par des véhicules électriques et convertir 50 millions de tracteurs.
Smil insiste sur le fait que les transitions énergétiques sont des processus longs, complexes et imprévisibles. Il critique les objectifs de neutralité carbone comme étant arbitraires et irréalistes sans une mobilisation mondiale sans précédent ou une réduction volontaire de la consommation énergétique.
Le livre a été bien accueilli par la critique pour sa rigueur analytique et son approche réaliste. L’Express décrit Smil comme un « ultra-réaliste » qui démolit les fausses solutions et les discours faciles, soulignant que ses analyses sont lues avec avidité par un large spectre de lecteurs, allant de responsables politiques à des experts en énergie .
En somme, Smil appelle à une prise de conscience des défis réels de la transition énergétique, en prônant une approche basée sur des données concrètes et une planification réaliste, plutôt que sur des objectifs ambitieux mais difficilement atteignables.