Vous vous levez le matin. Vous regardez vos notifications de la nuit en préparant votre café. Plusieurs demandes d’amis non sollicitées apparaissent. Des femmes aux physiques d’influenceuses (ou des hommes) aux profils créés récemment. Profils parfois datant de la veille, avec des liens douteux menant à des sites pornos. Mais qu’est-ce que c’est ça ? Ce sont des brouteurs, basés bien souvent en Côte d’Ivoire (pour cibler le «marché» francophone), des hommes qui veulent votre argent. On vous explique.
«Brouteur» est une expression en Côte d’Ivoire pour désigner un mouton qui se nourrit sans effort. Ils ciblent massivement les Occidentaux sur les réseaux sociaux tels que Facebook et Instagram. Mais aussi les réseaux de rencontres. Leur tactique est bien simple : ils vont inviter l’homme ou la femme réelle derrière son écran (c’est-à-dire vous !) à discuter. Ça commence par des salutations d’usage et une certaine apparence de naïveté : «Bonjour, je m’appelle… et j’ai vu votre profil. J’aimerais beaucoup faire connaissance avec vous si vous n’avez pas d’objection». Si pour la plupart d’entre nous, la qualité plus que médiocre de leur français, la date de création de leur profil, le fait qu’ils aient seulement quelques amis (et les idiots vont même ajouter les comptes de leurs amis ivoiriens !) et la pornographie présente sur leur page sent l’arnaque à plein nez, ce n’est malheureusement pas le cas de tout le monde qui est capable de voir la supercherie.
Je connais un homme qui est tombé follement amoureux d’une «française» sur internet, et il a perdu plus de 30 000$ dans cette histoire. La femme prétendait travailler comme libraire en Côte d’Ivoire (ça ne sonne pas une cloche déjà ?), et avait besoin d’urgence d’argent pour revenir à la maison. Évidemment, il est arrivé plusieurs péripéties à notre demoiselle en détresse. Elle s’est fait voler, sa grand-mère a eu un accident. Et le Canada n’a pas voulu permettre la rencontre de nos deux amoureux en retenant madame à l’aéroport !
En réalité, c’est qu’il n’y a eu aucune femme dans cette histoire. Seulement des heures et des heures de discussions passionnées entre monsieur et «madame» qui était un brouteur en Côte d’Ivoire. Vous avez sûrement entendu parler d’une histoire comme ça dans votre entourage ou sur internet.
Moi-même, j’ai reçu à un moment donné un curieux message sur Instagram. Une femme à l’apparence asiatique, mais qui portait le nom de Castro prétendait s’intéresser à moi. Jolie femme en uniforme de l’armée américaine. Je trouve cela suspect. J’écris son nom sur Google, et je tombe sur quantité d’articles sur cette Coréenne mariée à un cubano-américain qui se serait joint à l’armée pour suivre son mari. À la suite d’un article concernant son implication musicale exemplaire, son identité aurait été volée par des brouteurs du Nigeria.
Sur Google, il est possible d’effectuer une recherche d’image inversée. Il s’agit d’aller sur Google Images et de télécharger la photo avec laquelle nous voudrions comparer les résultats. Souvent, on constate que les photos ont été dérobées sur des sites de mannequins, sur Instagram, sur des sites pornographiques.
En revanche, si cela vous arrive de recevoir ces invitations non sollicitées, n’hésitez pas et amusez-vous ! Sur le groupe Facebook Neurchi de brouteurs broutés, des centaines d’internautes partagent les discussions hilarantes qu’ils ont eues avec les brouteurs. Si certains sont vraiment de mauvaise foi, en mettant le blâme sur la personne visée (qu’ils accusent de mentir sur leur identité, le comble !), d’autres se confient comme des livres ouverts sur les conditions de vie en Afrique. Tout cela reste quand même que ce sont des criminels qui exploitent la misère affective d’une partie de la population pour faire beaucoup d’argent.