David Agren rapporte pour The Globe and Mail que la réponse peu engageante de la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum à l’invitation du Premier ministre canadien Mark Carney pour le sommet du G7 à Kananaskis (Alberta), en juillet prochain, témoigne de l’importance de ses priorités nationales et de ses doutes concernant les relations avec Donald Trump. Bien que Sheinbaum ait confirmé avoir reçu l’invitation de Carney, elle reste incertaine quant à sa participation, soulignant qu’elle évalue la situation au regard des enjeux internes du Mexique.
La décision de la présidente mexicaine de ne pas encore s’engager publiquement à assister à cet événement reflète une stratégie de gestion pragmatique de ses obligations domestiques et internationales. La présidente se trouve confrontée à une violence croissante, une économie stagnante et des élections judiciaires controversées, ce qui diminue son appétit pour les voyages diplomatiques à l’étranger. En effet, comme le souligne Agren, Sheinbaum suit un modèle de leadership à la manière de son prédécesseur, Andrés Manuel López Obrador, qui préférait limiter ses déplacements à l’étranger pour ne pas être perçu comme détournant de l’attention des problèmes internes du pays.
La non-committalité de Sheinbaum vis-à-vis du sommet pourrait également être liée à des considérations politiques complexes vis-à-vis des États-Unis et du Canada. Agren rappelle que la présidente a dû jongler avec des demandes croissantes de Donald Trump, notamment en matière de gestion de l’immigration et de lutte contre les cartels de drogue. Trump, qui a critiqué la gestion de Sheinbaum de la situation sécuritaire au Mexique, a proposé une intervention militaire américaine contre les cartels – une demande que la présidente a rejetée fermement. Pour Sheinbaum, cette situation met en lumière l’importance de maintenir une relation équilibrée avec Washington sans risquer de froisser l’administration Trump, dont les politiques, de plus en plus interventionnistes, compliquent davantage les relations avec le Mexique.
Les relations de Sheinbaum avec le Canada sont également teintées de méfiance. Sous l’administration d’AMLO, les relations bilatérales ont connu des tensions, notamment autour des politiques énergétiques nationales du Mexique, qui ont frustré les investisseurs canadiens. Les critiques de Justin Trudeau à l’égard des investissements chinois au Mexique ont aussi exacerbé les tensions. Le manque de confiance entre les deux pays persiste, bien que la nécessité de maintenir une relation pragmatique, surtout dans le cadre de l’Accord États-Unis-Mexique-Canada (USMCA), reste un enjeu stratégique crucial pour le Mexique.
En somme, l’incertitude de Sheinbaum quant à sa participation au G7 illustre la complexité de la diplomatie mexicaine sous sa présidence, où les enjeux internes, la gestion des relations avec les États-Unis et la nécessité d’un pragmatisme avec le Canada s’entrelacent. Comme l’indique Arturo Sarukhán, ancien ambassadeur du Mexique aux États-Unis, ce sommet aurait été une occasion idéale pour Sheinbaum de créer des liens personnels et d’établir une chimie diplomatique avec ses homologues, mais les circonstances domestiques et les tensions internationales compliquent cette possibilité.