Ottawa — Le gouvernement de Mark Carney s’apprête à déposer un budget dont le déficit projeté atteindrait près de 78 milliards de dollars, selon plusieurs sources bien informées à Ottawa. Ce chiffre marquerait une aggravation substantielle (~50%) du déséquilibre budgétaire par rapport à l’exercice précédent, évalué à 50,1 milliards, et annoncerait un virage économique majeur pour le nouveau premier ministre, qui promet un plan d’investissements « générationnels » destiné à redéfinir la trajectoire du pays.
Un plan ambitieux pour relancer la croissance
Comme le rapporte John Paul Tasker pour CBC News, le ministre des Finances François-Philippe Champagne a promis un budget « big, bold » — « le genre de budget dont on se souviendra ». Le document, qui sera déposé cet après-midi, contiendra de nouveaux investissements majeurs en matière d’infrastructures, de défense et d’habitation.
Parmi les mesures déjà annoncées figurent :
- un fonds de 50 milliards pour le logement et les infrastructures locales ;
- 9 milliards pour la défense ;
- des incitatifs à l’investissement industriel et énergétique ;
- des compressions de 15 % dans la fonction publique sur trois ans.
Carney et Champagne souhaitent aussi séparer plus clairement les dépenses en capital (infrastructures, projets à long terme) des dépenses opérationnelles (salaires, transferts et programmes), promettant d’équilibrer ces dernières d’ici 2028.
Des critiques déjà virulentes
Avant même le dépôt du budget, le chef conservateur Pierre Poilievre a dénoncé une trajectoire qu’il juge inflationniste et insoutenable : « Encore plus de dépenses, plus de dettes, plus de taxes, plus d’inflation », a-t-il déclaré lors d’un point de presse à Ottawa. Son parti réclamait que le déficit soit limité à 42 milliards, un seuil qui reflétait les projections de l’ancien gouvernement libéral.
Le Bloc québécois réclame pour sa part une hausse des transferts en santé et des prestations pour aînés, tandis que le NPD, par la voix de son chef intérimaire Don Davies, a averti qu’il ne soutiendrait pas un budget jugé trop austère. L’issue du vote demeure donc incertaine : avec 169 sièges, le gouvernement minoritaire devra rallier au moins quelques députés d’opposition pour éviter un renversement avant Noël.
Un contexte économique tendu
Toujours selon CBC News, le budget Carney entend « transformer l’économie canadienne de la dépendance à la résilience » et miser sur un effet de levier des dépenses publiques pour « catalyser l’investissement privé ». Mais cette stratégie intervient alors que plusieurs économistes, dont le directeur parlementaire du budget intérimaire Jason Jacques, ont exprimé des inquiétudes face à la trajectoire fiscale du pays, la jugeant « insoutenable » à moyen terme.
Le gouvernement défend toutefois un plan de redressement graduel, affirmant que le déficit actuel résulte d’investissements nécessaires pour soutenir la croissance et la sécurité économique du pays.
Une équation délicate
Le premier budget Carney sera présenté cet après-midi à Ottawa. Il devra concilier la promesse d’une transformation économique durable avec la montée des inquiétudes sur la dette fédérale. L’opposition, de son côté, en fera un test de crédibilité pour un gouvernement qui se veut à la fois ambitieux et discipliné.



