La galanterie exige de l’homme un dépassement de soi qui lui vient de sa force, de son courage et de la canalisation de sa puissance sexuelle. En fait, un homme galant est un homme parfaitement viril.
La violence et le harcèlement sexuel envers les femmes incitent plusieurs d’entre elles à remettre en question l’esprit macho et le concept de virilité. Quand on lit Benoîte Groult qui a pour moto que « […] le féminisme n’a jamais tué personne […] le machisme tue tous les jours », il n’est pas surprenant qu’un bon nombre de féministes regimbent contre ce concept souvent associé à la virilité « masculine ». Elles ont, néanmoins, raison de s’y opposer lorsqu’on apprend qu’approximativement 90 % des hommes et des femmes de notre planète ont des préjugés envers les femmes. Par ailleurs, lorsque Geneviève Pettersen nous a fait prendre conscience qu’en moyenne, au Canada, une femme par semaine est tuée par son conjoint, il ne faut pas s’étonner qu’on veuille enrailler toute forme de machisme. Les funérailles de la jeune Océane Boyer qui a été présumément violentée et assassinée par un proche de la famille nous bouleversent tous et nous montrent combien la méchanceté des hommes peut être cruelle. Par contre, lorsqu’on va jusqu’à affirmer qu’il faille sortir de la masculinité, là, on pousse un peu fort.
Une virilité sensée
En tant que société dite civilisée, comment peut-on amener les hommes à ne pas avoir honte d’être des hommes et à affiner leur masculinité sans sombrer dans le machisme? En bref, la réponse se trouve dans une virilité canalisée, une virilité sensée. Comme l’a si bien exprimé Mathieu Bock-Côté, « […] un homme devrait pouvoir être élégant, raffiné, cultivé, délicat et viril, tout à la fois. Sans jamais douter d’être un homme, autrement dit ». Cette virilité canalisée s’appelle la galanterie. Selon Jean-Jacques Courtine, professeur à la Sorbonne, le sentiment de virilité s’est construit, au fil des temps, principalement autour de trois valeurs : la force, le courage, la puissance sexuelle.
Canalisation et non castration
Canaliser une force a pour objet de la diriger et de la concentrer pour l’utiliser à bon escient. Canaliser le feu sert à nous réchauffer le cœur et le corps. Ainsi en est-il de la galanterie! Se servir de sa virilité au bénéfice de la féminité. À l’origine, la galanterie servait à canaliser la virilité masculine. Apparue au 12e siècle, elle avait été instaurée chez les chevaliers pour leur inculquer la maîtrise de soi. Par la suite, elle a été popularisée en France, au 17e siècle pour mettre en valeur la personne qui en était l’objet. Ainsi, la canalisation de la virilité devrait avoir préséance sur sa castration. C’est essentiellement ce qu’affirme avec doigté une femme d’exception : « Ainsi, un homme galant ne peut tout se permettre. Au contraire, il doit faire preuve de retenue et de sobriété des mœurs. Il doit raffiner ses manières, surveiller son langage et prouver sa sophistication à la femme qu’il côtoie. La galanterie impose la cordialité, la courtoisie et le respect dans les échanges, et ne tolère ni la vulgarité ni le laisser-aller. La galanterie débrutalise et discipline! » En quelques mots, Nathalie Elgrably-Lévy exprime qu’il faut du courage, de la maîtrise et la force de retenir ses pulsions. Castrer la virilité, c’est empêcher l’homme de faire sentir à la femme qu’elle doit être traitée avec soin.
Pour un noble but
Se contenir pour se contenir n’a rien de noble en soi. Se contenir pour déployer de la courtoisie et donner de la valeur à son égal produit des attitudes et des comportements qui sont aux antipodes de la violence, du harcèlement et du dénigrement. Non seulement, la galanterie forme les « mâles » à traiter les femmes avec circonspection et assurément comme son égal, parce qu’elle constitue, selon la professeure aux HEC , « […] un code de conduite, un ensemble de conventions et une discipline éthique qui régulent les relations entre les hommes et les femmes ».
Osez
Être galant, aujourd’hui, prend du courage, car plusieurs féministes s’y opposent. Or, le sens même de la galanterie est de maîtriser ses ardeurs pour accorder une plus grande valeur à son alter ego. Si la galanterie était valorisée et surtout associée à la virilité, les hommes seraient éduqués à prendre soin des femmes comme étant des personnes égales à eux et qui ont de la valeur. Ce changement exige, d’abord des hommes, du caractère, de la force contre une opposition féroce et du courage face aux mauvaises interprétations, ensuite, de la part des femmes, qu’elles apprécient le respect à leur égard qui résulte d’une force masculine canalisée. Enfin, au lieu de machisme, on parlerait de courtoisie galante envers les femmes, d’une saine virilité, canalisée pour faire du bien. En définitive, la virilité au sens propre du terme serait à l’honneur.