Par Stephen Buffalo, Président/CEO du Conseil Indien des Resources (Indian Resource Council)
J’écris ce texte au nom du Conseil des ressources indiennes, pour revendiquer notre droit, en vertu de la Constitution canadienne, d’être consultés sur les changements importants qui ont un impact sur nos territoires traditionnels.
L’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des Autochtones (UNDRIP), qui prévaut sur les lois canadiennes existantes, aura un impact sur nos territoires traditionnels. L’actuel projet de loi C-15 ne contient pas de dispositions claires sur l’application régulière de la loi et ne contient pas de protections pour assurer que nos droits existants à la consultation en vertu de la loi existante ne soient pas diminués. Ce projet de loi est peut-être bien intentionné, mais il ne peut être imposée unilatéralement.
Nous soutenons pleinement la reconnaissance internationale des droits des autochtones. Les peuples autochtones canadiens se sont battus pendant des générations pour prouver que leur titre n’était pas éteint et qu’ils avaient le droit d’être consultés et de participer de manière significative au développement de leurs territoires traditionnels. Il y a des peuples autochtones dans le monde qui ne bénéficient pas de ce respect ni de la reconnaissance du fait qu’ils étaient là les premiers. Nous devons les soutenir et soutenir leurs aspirations, tout comme les peuples autochtones canadiens ont été soutenus par de nombreuses personnes dans leur longue lutte pour la reconnaissance.
Notre combat au Canada n’est pas terminé. Notre droit d’être consulté et de nous opposer aux projets de développement des ressources est souvent reconnu – mais qu’en est-il de notre droit de dire oui. Mais qu’en est-il de notre droit de dire oui ? Qu’en est-il de notre droit d’être inclus de manière significative dans le processus décisionnel et de partager la propriété des projets sur nos terres ? L’égalité et le pouvoir réels ne résident pas seulement dans le droit de dire non, mais aussi dans le droit de dire oui – et d’être inclus de manière significative.
Nous devons rester vigilants au Canada. Il existe un écart impardonnable en matière de progrès humain entre nos peuples autochtones et les autres Canadiens. Les déclarations internationales et la reconnaissance superficielle de nos droits ne suffisent pas. S’il existe un racisme systémique au Canada, il n’y a pas d’expression plus claire de celui-ci que dans la terrible pauvreté et le manque d’eau potable dans plusieurs réserves. Tant que les droits des peuples autochtones ne seront pas synonymes de respect réel de notre culture, d’emplois réels et de participation réelle aux opportunités économiques, nous lutterons pour être égaux sur nos propres terres. Notre travail, pour transformer nos droits récemment reconnus en une véritable égalité, est loin d’être terminé.
Nous ne voulons pas d’un service de belles paroles de la part d’Ottawa avec une tape paternaliste sur la tête pour nous dire ce qui est bon pour nous. Ne nous dites pas avec condescendance que vous faites cette nouvelle loi pour nous aider et que nous ne devons pas nous inquiéter. Nous voulons être consultés sur les changements juridiques majeurs concernant nos droits et nous voulons que cette consultation soit significative. Nous nous sommes battus pour cela, la Cour suprême nous a donné raison, et nous le méritons.
Imaginez l’ironie de l’introduction d’une loi sans consultation et sans réelle tentative d’obtenir un « consentement préalable libre et éclairé » qui donnera à des groupes indéfinis de peuples autochtones un droit indéfini au consentement. Dans le cadre de ce projet de loi, on peut imaginer qu’une nation verra son propre projet bloqué, parce qu’elle ne peut pas obtenir le « consentement préalable libre et éclairé » des dissidents de la réserve. Ce qui est inimaginable, c’est qu’Ottawa n’ait pas consulté de manière significative et n’ait pas obtenu le consentement des Premières Nations sur un sujet aussi fondamental.
Outre nous, la Coalition nationale des chefs, toutes les nations du traité 6, du traité 7, du traité 8 et des dizaines d’autres nations à travers le Canada ont exprimé leur inquiétude quant à la façon dont ce projet de loi fonctionnera en pratique et ont demandé des amendements. Nous craignons qu’il ne nous prive de notre souveraineté et ne diminue nos droits en vertu de la Charte des droits et libertés.
Le gouvernement nous ignore tout simplement.
La situation se résume à ceci. Nous avons gagné le droit d’être consultés et nous voulons être réellement consultés. Nous dire du haut d’Ottawa ce qui est bon pour nous, sans même nous demander notre avis, est une expression irrespectueuse du privilège de l’élite et une aberration de nos droits.
Nous voulons des amendements et des clarifications à ce projet de loi. Nous sommes favorables à la reconnaissance des droits des peuples autochtones, non seulement au Canada mais aussi à l’échelle internationale, mais nous ne voulons pas que notre droit de dire oui soit diminué ou, pire encore, supprimé. Ce projet de loi doit être modifié pour qu’il soit clair que de petits groupes aux revendications ténues ne pourront pas bloquer la volonté des Premières Nations et des peuples autochtones exprimée par leurs dirigeants légitimes. Il doit y avoir une procédure régulière.
Nous ne voulons pas revenir aux blocages des chemins de fer. Si ce nouveau projet de loi n’est pas appliqué correctement, les blocages pourraient devenir un mode de vie. Personne ne progressera, ni les peuples autochtones, ni les Canadiens en général. Le risque est que l’inégalité demeure – nous avons une chance d’apporter un changement systémique – ne la manquons pas.
Il est temps de combler le fossé du progrès humain au Canada et de permettre à nos peuples autochtones de participer et de s’approprier le processus dans le plein respect de nos cultures. Nous demandons au gouvernement de joindre le geste à la parole en matière de respect des droits des autochtones. Ottawa doit entamer immédiatement des consultations significatives de nation à nation sur ce projet de loi.
Pour le moment, le gouvernement fédéral continue de nous ignorer.