Au Canada, le spectre du « Freedom Convoy » continue de hanter la scène judiciaire et politique plus de trois ans après les événements qui avaient paralysé la capitale fédérale. Un article de Jim Bronskill, publié le 4 novembre 2025 dans le Toronto Sun (via La Presse canadienne), rapporte que Tamara Lich a officiellement interjeté appel de sa condamnation pour méfait, prononcée plus tôt cette année en lien avec son rôle d’organisatrice du « Freedom Convoy » qui avait paralysé le centre-ville d’Ottawa en février 2022.
Retour sur une affaire hautement symbolique
Le dossier de Tamara Lich, militante albertaine devenue l’une des figures emblématiques du mouvement de protestation contre les mesures sanitaires, demeure l’un des plus controversés de la période post-pandémique. Aux côtés de Chris Barber, autre organisateur clé du convoi, elle avait été reconnue coupable en avril 2025 de méfait pour sa participation à la manifestation de masse ayant transformé la capitale fédérale en zone d’occupation pendant plusieurs semaines.
Le convoi, qui avait commencé à se former à la fin de janvier 2022, réunissait des milliers de manifestants et de camionneurs, dont plusieurs venus de l’Ouest canadien, pour protester contre les restrictions liées à la COVID-19, les obligations vaccinales, et plus largement contre le gouvernement de Justin Trudeau. Si l’événement avait débuté comme une mobilisation contre les mandats sanitaires, il avait rapidement pris une tournure politique et sociale plus vaste, attirant divers groupes opposés aux politiques fédérales.
Les arguments de la défense en appel
Selon le compte rendu de Jim Bronskill, les avocats de Tamara Lich soutiennent que la juge du procès a erré en ne tenant pas compte du fait que leur cliente avait constamment appelé les manifestants à demeurer pacifiques, respectueux et prudents. Ils affirment qu’aucune preuve directe ne lie Lich aux comportements répréhensibles de certains participants — notamment les blocages d’accès et le harcèlement dénoncés par les résidents du centre-ville.
La défense avance également que la Charte canadienne des droits et libertés protège la liberté d’expression, même lorsqu’elle s’exerce dans un contexte de protestation jugée dérangeante. À ce titre, les avocats estiment que la communication et les actions pacifiques de Lich relevaient d’un exercice constitutionnellement protégé, et non d’un acte criminel de méfait.
L’appel sera entendu par la Cour d’appel de l’Ontario, mais aucune date d’audience n’a encore été précisée.
Un précédent juridique au cœur du débat sur les libertés civiles
L’affaire Lich soulève des questions profondes sur les limites du droit de manifester au Canada. Pour plusieurs observateurs, cette cause pourrait devenir un jalon jurisprudentiel dans la définition du seuil entre manifestation pacifique et obstruction criminelle.
Le Freedom Convoy avait déjà conduit à l’invocation historique de la Loi sur les mesures d’urgence par le gouvernement Trudeau — une première depuis son adoption en 1988 —, décision qui demeure au centre de nombreuses contestations politiques et judiciaires.
Le résultat de cet appel pourrait donc avoir des répercussions dépassant le seul cas de Tamara Lich, en redéfinissant la frontière entre désobéissance civile et infraction pénale dans un contexte de mobilisation populaire.



