La Covid a mis en lumière que notre système de santé est trop lourd à gérer, que les soins prodigués aux aînés ont été négligés, que le nombre de préposés était nettement insuffisant et que nos ressources en santé mentale sont sur le point d’être rapidement dépassées.
À mon avis, on devrait ajouter à la liste des personnes affectées par la Covid, qui comprend celles qui en sont atteintes, celles qui sont en soins intensifs et celles qui en sont décédées, cette nouvelle catégorie : les personnes qui ont dû avoir recours à de l’aide psychologique, psychiatrique ou thérapeutique. Cette statistique plus globale permettrait au gouvernement de mieux cibler ses interventions.
En temps de crise sanitaire, la santé physique des contribuables et les ressources pour prendre soin d’eux doivent être évaluées, bien sûr, mais cette mesure n’est pas suffisante, car on doit tenir compte également des indicateurs de l’état mental des Québécois, qui, dans les faits, se détériore.
En tant que société, on a acquis l’idée que les maladies mentales se soignent presque exclusivement par la médication. On oublie que les psychothérapies et le respect d’une bonne hygiène de vie joueront aussi un rôle significatif dans la convalescence ou le traitement de la maladie diagnostiquée. En d’autres mots, les gens affectés émotionnellement, mentalement ou psychologiquement par la Covid ne pourront pas vaincre leur mélancolie anxieuse qu’avec la médication.
Les effets collatéraux
Cela dit, la crise actuelle fait en sorte que plusieurs Québécois se retrouvent sans emploi, éloignés de leurs proches, isolés, en un mot, seul au monde. Les plus introvertis n’iront pas vers les autres, ils se tourneront plutôt vers le divertissement électronique, la dépendance numérique, et la pornographie.
Des mesures adéquatement ciblées
Combien de nos concitoyens souffrent dans le silence, combien sont sur le point de faiblir, de craquer. Pour beaucoup de personnes seules, la vie est très difficile en ces temps de pandémie. Si le gouvernement savait que le nombre de citoyens qui consultent pour des raisons de santé psychologique et mentale augmente, il changerait son approche. Ses mesures de confinement seraient mieux ciblées, comme accorder plus de pouvoir à la santé publique locale. Dans le cas, par exemple, où aucune éclosion ne s’est produite dans une salle d’entraînement dans un secteur donné, pourquoi devrait-elle fermer ? Certains diront que cette diversification des mesures deviendrait trop lourde à gérer. Or, si c’est le cas, pourquoi avoir une direction de la santé publique régionale, laissons alors Québec décider de tout ! Nous avons des médias régionaux, des systèmes de communication adéquats, chaque entreprise concernée a les ressources pour aviser ses membres, nous n’avons plus besoin d’un bulletin de nouvelles pour savoir si notre salle d’entraînement continue à ouvrir ses portes, etc. Ces centres qui visent la mise en forme physique sont essentiels pour permettre à des personnes seules de se remonter le moral, de voir du monde et de socialiser sainement de temps à autre.
Les mesures actuelles ne touchent pas uniquement la santé physique des gens, elles ont aussi un effet direct sur le moral des troupes. Sur ce point, Cécile Bardon, professeure au département de psychologie de l’Université du Québec à Montréal mentionnait ceci : « L’isolement, le manque de soutien, l’intimidation, le manque d’accès à des ressources adéquates et l’insécurité économique sont tous des facteurs fortement associés au suicide. La pandémie de COVID-19 exacerbe certains de ces facteurs et pourrait amener à moyen terme une augmentation des comportements suicidaires dans la population. » Selon l’Université de Toronto, le nombre de suicides lié à la Covid pourrait connaître une augmentation approchant les 500 %.
Je suis conscient qu’afficher une augmentation du nombre de suicides comporte des risques, voire un effet d’entraînement. Cependant, si on intégrait ces chiffres dans l’augmentation du nombre de personnes affectées mentalement et psychologiquement par la pandémie, le gouvernement modifierait sa tactique de prévention de la propagation du virus.
Plus de transparence sur les statistiques liées à la santé mentale montrerait une préoccupation plus proche de la réalité de la part de notre gouvernement. Sans mettre de côté la santé physique de la population et les ressources pour l’assurer, il est essentiel que le gouvernement tienne compte également de la santé mentale et psychologique dans ses mesures sanitaires. Cependant, pour y arriver, une opposition plus vigoureuse et moins collée sur ses intérêts électoralistes est nécessaire. Je comprends qu’au début de la pandémie, l’opposition devait, pour le bien des citoyens, faire front commun avec le gouvernement, et c’est ce qu’elle a fait. Maintenant que le moral des troupes se détériore et que la confiance s’effrite, le gouvernement de la CAQ aurait intérêt à changer son approche. Une seule chose l’empêche, il est trop populaire. En définitive, sa popularité contribue à réduire le moral des troupes et à affaiblir notre tissu social.