Le 30 mars dernier, je déposais au Sénat du Canada le projet de loi S-231, lequel vise principalement à contrer la violence familiale, projet de loi intitulé « Loi modifiant le Code criminel et une autre loi en conséquence (mise en liberté provisoire et engagement en cas de violence familiale.) »
Je veux dans un premier temps rendre hommage aux neuf femmes assassinées récemment au Québec et à leurs vingt enfants à qui on a volé le rêve d’aimer et chérir leurs mères pour de nombreuses années.
Cette vague d’homicides sans précédent est inquiétante. Elle nous confirme que notre société et notre système de justice n’en font pas assez pour protéger ces femmes et ces enfants.
Beaucoup de ces femmes assassinées ont payé de leurs vies de ne plus avoir à accepter d’être soumises à cette violence. Elles en ont payé de leurs vies souvent parce que notre système de justice, qui les invite fortement à dénoncer, ne les protège pas adéquatement quand elles ont le courage de le faire. Mais comme je le dis et le répéterai toujours, ce courage a un prix, leurs vies.
C’est la raison pour laquelle, je propose ce projet de loi qui prévoit de donner la possibilité à un juge d’imposer le bracelet électronique à l’étape de la remise en liberté provisoire pour un prévenu en attente de son procès et également lorsqu’un juge ordonne à un prévenu de contracter une ordonnance de ne pas troubler la paix que l’on appelle communément une ordonnance 810. Ce projet de loi créerait donc une ordonnance spécifique à la violence conjugale et la protection de la femme serait au centre des conditions imposées à l’agresseur.
Le bracelet électronique dans le contexte de la violence conjugale, qui est déjà utilisé en Espagne et France, est un outil technologique qui permettrait d’assurer une surveillance permanente et continue des mouvements du prévenu remis en liberté. En cas de violation du périmètre de sécurité par l’agresseur défini par le bracelet, la victime et les autorités seraient directement alertées. Ce moyen technologique donnerait une chance à la victime de se mettre en sécurité et d’échapper à son agresseur. C’est au début du processus judiciaire que nous devons agir, car c’est à ce moment-là que les femmes sont les plus vulnérables et qu’elles sont victimes d’homicides.
Cela fait deux ans que je travaille sur ce projet de loi. Depuis deux ans, je côtoie tous les jours des femmes qui vivent ou ont vécu de la violence conjugale. Des femmes qui me racontent leurs parcours et qui me communiquent leurs peurs pour elles et leurs enfants parce qu’elles ont décidé un jour de ne plus rester emmurées dans le silence de celle-ci qui était leur prison depuis des années.
Afin de les aider à dénoncer la violence qu’elles subissent, le système de Justice doit se doter d’une législation qui va leur garantir une protection permanente. Pour y arriver, le projet de loi prévoit donc la création d’une nouvelle ordonnance de ne pas troubler la paix spécifique à la violence familiale qui inclut de nouvelles mesures destinées à les protéger. En autre, cette ordonnance est plus longue que l’ordonnance générale notamment pour les récidivistes. Elle prévoit une peine plus sévère en cas de refus de la contracter et elle prévoit d’obliger un juge à consulter la victime de violence familiale en cas de modifications des conditions de l’ordonnance. C’est la première fois qu’une section du Code criminel réserve un volet spécifique à la violence familiale.
La rédaction de ce projet de loi est le fruit du travail et de la réflexion de femmes courageuses qui ont décidé de prendre la parole et me faire confiance. Elles m’ont éclairé, elles m’ont permis de me débarrasser de mes préjugés face aux femmes qui vivent cette violence, tous les jours, toutes les semaines et pendant des d’années. Elles m’ont permis de comprendre leur prison, leur silence et leur impuissance et surtout le courage dont elles ont dû puiser profondément en elles pour ne plus accepter d’être soumises, dominées et terrifiées chaque seconde de leur existence de conjointe, de mère et surtout de femme.
Elles sont toutes d’accord que les hommes violents qui partageaient leurs existences ont besoin d’aide, qu’on ne peut plus juste leur suggérer d’aller chercher cette aide, mais que nous avons le devoir d’exiger qu’ils y aillent, parce des vies d’innocentes victimes en dépendent. Ce projet de loi prévoit la possibilité pour un juge, sous la supervision du tribunal, d’obliger un prévenu à suivre une thérapie en violence conjugale et en toxicomanie, si le juge estime que la thérapie peut aider le prévenu à diminuer son comportement violent dans le seul objectif de protéger la vie de la victime.
Actuellement, ces services sont si peu disponibles ou si longs à recevoir, quand ces hommes le demandent, que j’en appelle autant aux gouvernements de nos provinces respectives et au gouvernement fédéral d’investir dans cette aide. En le faisant, nous allons agir sur la cause principale de tous ces meurtres, trop souvent prévisible.
Ce projet de loi sera déposé au mois de mai prochain à la Chambre des communes par mon collègue le député Jacques Gourde. Ainsi, cheminant à la fois dans les deux Chambres du Parlement, souhaitons qu’il soit adopté d’ici la fin de 2021. C’est dans ce sens que j’ai adressé une lettre au Premier ministre Trudeau le 9 avril dernier.
Mais entre-temps, que demandent ces femmes? SIMPLEMENT ÊTRE ENFIN PROTÉGÉES quand elles veulent sortir de cette prison qui les tuera un jour.
Il y a urgence à agir et ce projet de loi est une première pierre à cette longue réforme du système de Justice que je souhaite de tout cœur pour mettre fin à ce fléau qui est la violence familiale.
En conclusion, je vous invite à suivre l’actualité sur ma page Facebook. Au moment du dépôt à la Chambre des communes du projet de loi, j’inviterai les hommes et les femmes de partout au Canada à poser un simple geste de solidarité qui pourrait faire toute la différence pour ces milliers de femmes qui vivent tous les jours dans la peur.