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Jérôme Blanchet-Gravel sur la gestion de crise sanitaire au Mexique et au Québec

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Entrevue avec Jérôme Blanchet-Gravel, essayiste, journaliste et chroniqueur.

Q : Andrés Manuel López Obrador est le président du Mexique depuis le 1er décembre 2018.  Grosso modo, quel est son plan et sa philosophie politique ?

JBG : Ancien maire de Mexico, celui que l’on surnomme AMLO a surtout promis de libérer le pays des élites corrompues, ce qui ne pouvait que s’annoncer extrêmement difficile. Durant la campagne présidentielle qui a mené à son élection, il s’est présenté comme un homme politique qui allait faire un grand ménage dans les institutions publiques, une sorte de justicier incorruptible que les grands médias essaieraient de faire taire. Il joue un peu la carte du héros contre le méchant système.

AMLO est un homme de gauche mais surtout de gauche économique : en Amérique latine, la gauche woke est encore très embryonnaire. Ultra-populiste, le président mexicain aime se présenter comme un homme à l’écoute des classes les plus pauvres, et par le fait même, à l’écoute des habitants d’origine amérindienne.

Q : Quelle politique sanitaire M. Obrador a-t-il mis en place durant la pandémie ?

JBG : Il faut d’abord rappeler que le Mexique est une fédération. Comme au Canada et aux États-Unis, chaque État a été appelé à développer sa propre politique sanitaire. Les villes peuvent aussi avoir un rôle à jouer. L’État central a bien sûr mis en place une stratégie nationale contre le virus, mais il n’est pas imputable de tout.

En gros, López Obrador a beaucoup surpris au Mexique et à l’international en apparaissant comme un président très compréhensif qui ne jouerait pas à la police du Covid-19. Récemment, AMLO a déclaré qu’il avait attrapé le virus «parce qu’il devait travailler comme des millions de Mexicains». Le même jour, il a aussi dit que «nous ne pouvions pas vivre enfermés» et qu’il ne porterait plus le masque, car il n’était de toute façon plus contagieux. On est loin de l’approche des dirigeants occidentaux et surtout de celle notre premier ministre québécois, François Legault, qui lui, a décidé de faire du Québec un leader mondial du sanitarisme.

Toutefois, ce qui est le plus intéressant à observer pour les Québécois, c’est que le nombre de morts par habitant attribués au Covid-19 est seulement un peu plus élevé au Mexique qu’au Québec. Allez voir les chiffres. C’est assez phénoménal quand on réalise, ici sur le terrain, que les mesures sont beaucoup moins contraignantes. À part les écoles, tout est ouvert, ou presque, sauf que le port du masque est généralisé. Les Mexicains sont prêts à porter le masque comme une sorte d’amulette leur permettant de poursuivre leurs activités normalement. Ils ne renonceraient pas à leur mode de vie.

Donc : soit plusieurs mesures adoptées par le gouvernement Legault sont complètement inutiles (comme le couvre-feu et la fermeture des restos), soit son bilan est comparable à celui d’un pays en voie de développement, ce qui est loin d’être reluisant. C’est peut-être aussi un peu les deux.

Q : Est-ce que les Mexicains sont satisfaits du travail de leur président en ce qui concerne la gestion de la crise sanitaire ?

JBG : Dur à dire. Plusieurs Mexicains sont convaincus que leur pays faire rire de lui à l’international, mais tous ne réalisent pas que de plus en plus d’Occidentaux se sentent étouffés par la situation. Un vent de contestation est en train de prendre dans les pays riches. Qui aurait cru qu’un pays aussi pauvre et corrompu que le Mexique pourrait finalement apparaître comme un modèle à suivre en matière de quelque chose ?

Mais ce qu’il faut surtout garder en tête, c’est que la crise du Covid-19 est loin de rivaliser avec la pauvreté et la violence en termes de problèmes à régler. La police n’a pas vraiment le temps de donner des amendes sur la base d’infractions liées au Covid : elle a bien d’autres priorités, comme les vols, les meurtres et les disparitions. À l’instar du président lui-même, je pense que plusieurs Mexicains sont bien conscients que de rigides mesures de confinement feraient bien plus de mal que le virus lui-même. Si vous ne pouvez plus manger parce qu’il est impossible de sortir de chez vous pour exercer votre métier, ce n’est pas vraiment mieux que d’attraper le virus.

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