Dans cette troisième phase de la crise, le Québec a besoin d’une opposition qui laisse ses intérêts partisans de côté pour le bien commun.
Règle générale, une crise comporte quatre phases. La première, la phase héroïque, où les leaders prennent en charge la situation avec courage et bienveillance. On se retrousse les manches, on attaque bravement le problème pour y remédier. Ensuite, vient la phase de la lune de miel. C’est là que l’on voit l’efficacité de ses mesures. Les choses bougent, on a confiance et tout le monde coopère. Or, vient un temps où la patience de tout un chacun est mise à rude épreuve, la lune de miel est terminée, et c’est la désillusion. C’est la troisième phase. Les plaintes affluent, et les critiques des partis de l’opposition se font entendre. Ceux-ci ont un choix à faire, répliquer pour construire et aider, ou contester en opportunistes. Enfin, la quatrième phase, c’est la reconstruction.
Le désenchantement
À ce jour, nous nous trouvons dans cette troisième phase, celle du désenchantement. Elle aurait pu être retardée, car le plan Legault allait bon train, mais depuis le mois d’avril, une escalade d’événements et de signaux ont précipité l’arrivée de cette avant-dernière phase.
Le tout a commencé par un écho à peine perceptible et qui a presque échappé à notre conscience. Un léger son de cloche de pharmaciens à bout de souffle s’est mêlé au tumulte des voix environnantes. Par peur des centres hospitaliers, un bon nombre de patients se sont tournés vers les pharmaciens pour obtenir des conseils. Résultat : ces derniers demandent l’aide du gouvernement pour assurer la pérennité des services à la clientèle.
En outre, ce qui marque définitivement cette troisième phase est la perte de contrôle dans les Centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD). À ce phénomène malheureux, s’est ajoutée la voix du chef de l’opposition officielle, Pierre Arcand, qui a sommé l’équipe Legault de faire appel au corps médical des Forces armées canadiennes pour pallier l’absence de ressources dans les CHSLD. Pourtant, depuis le début de la crise, l’opposition s’était contentée de faire part de ses doléances à circuit fermé.
Et là, tout s’est mis à débouler.
Par la suite, des signes de détresse se sont manifestés au sein du personnel soignant. On lui a fourni du support psychologique pour qu’il tienne le coup. Il était au bout du rouleau, on perdait de plus en plus de soldats sur le terrain, à un point tel que le 30 avril dernier, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (Fiq) a demandé au gouvernement d’amender l’arrêté ministériel qui empêchait le personnel de la santé de prendre des vacances durant la période de pandémie. Quelques jours plus tard, le premier ministre s’est rendu à l’évidence, il s’est rangé derrière la Fiq et a mis tout en œuvre pour que le personnel soignant puisse récupérer.
Une autre fois, le chef de l’opposition s’est manifesté et est revenu à la charge en remettant en question le plan de déconfinement du gouvernement dans la région métropolitaine. Après lui, le mécontentement du co-porte-parole du deuxième parti d’opposition a retenti. Gabriel Nadeau-Dubois s’en est pris à Marguerite Blais, la ministre des aînés, la blâmant de ne pas avoir été à la hauteur de la situation quant à la gestion des services offerts aux personnes âgées dans les CHSLD. Plus les jours avancent, plus le ton de la grogne monte. L’opposition n’a que deux options : contribuer constructivement au bien commun ou travailler pour ses intérêts partisans. La nuance est mince, mais la bienveillance du geste fait toute la différence.
Une opposition constructive
Compte tenu que les travaux des commissions parlementaires ont repris et que l’Assemblée nationale sera convoquée la semaine prochaine, il s’avère primordial que l’opposition officielle ne succombe pas à la tentation de troquer le bien commun pour un bénéfice partisan.
La population soupire après une vie active sereine et désire ardemment retrouver sa liberté. Quand les professionnels de la solitude soupirent après le déconfinement, ça en dit long sur l’état d’esprit général de la population. Les enfants, les parents, les personnes âgées, les gens seuls, les chômeurs et les commerçants, tous souffrent de ce confinement. C’est pourquoi nous avons besoin d’une opposition créative, constructive et collaboratrice qui veillera à ce que les mesures gouvernementales visent un retour à une vie sociale active, sécuritaire et adaptée à notre capacité d’offrir des soins de santé.
Si elle est patiente, l’opposition pourra encore mieux jouer en faveur de ses intérêts partisans en temps et lieu, si maintenant, elle coopère de façon bienveillante et généreuse avec le parti au pouvoir. Le moment propice pour elle sera lors de la quatrième phase, celle de la reconstruction.
Le rôle crucial de l’opposition
Lors de la phase de reconstruction, ce sera le bon moment de faire le point, de chercher à savoir ce qui aurait pu être mieux géré, de planifier comment bâtir l’avenir en ayant appris de nos erreurs et de prévoir un plan d’attaque musclé contre une prochaine pandémie. C’est à ce moment-là, lorsque la vie aura repris son cours normal, que l’opposition pourra frapper sur le clou, particulièrement si le gouvernement du Québec ne se sera pas montré suffisamment musclé dans ses négociations avec le gouvernement central. En effet, si Québec n’arrive pas à convaincre Ottawa de retarder l’ouverture des frontières étrangères et des aéroports civils, nous serons à risque de passer par une recrudescence de la contamination. À l’exemple des pays qui ont peu de cas de contamination, plus nous retarderons la circulation aux touristes et aux voyageurs étrangers, plus nous serons en mesure de contrôler ce qui se passera sur notre territoire.
Une opposition solidaire et complémentaire
Si l’opposition parle sincèrement pour le bien commun, elle aura l’admiration de la population. Elle se fera rassurante et gagnera la confiance de la population. En revanche, si elle intervient tout simplement pour des motifs de partisannerie, elle ne gagnera pas la sympathie de la population et contribuera à la réélection de la Coalition Avenir Québec. Nous avons besoin de l’opposition plus déterminée que jamais à contribuer, avec créativité et sincérité, au bien commun et à un retour à la vie active, gérée avec prudence, sagesse et circonspection.
En bref, nous avons besoin d’une opposition constructive!