Cela fait déjà quelques années que des gens ont lancé l’alerte au sujet de l’Initiative du Siècle (Century Initiative) qui souhaite, pour des raisons économiques, faire du Canada un pays de 100 millions d’habitants à l’horizon 2100. Les chroniqueurs du Journal de Montréal ont aussi alerté l’opinion publique sur ce lobby puissant dont les recommandations sont appliquées à la lettre par Justin Trudeau. D’ailleurs, un des cofondateurs de la Century Initiative, Dominic Barton, fut nommé ambassadeur du Canada en Chine par Justin Trudeau. C’est dire l’influence de ce lobby. M. Barton fut directeur général mondial de McKinsey entre 2009 et 2018, entreprise qui est derrière la gestion par le gouvernement du Québec de la pandémie de Covid-19 ainsi que derrière les politiques de Justin Trudeau en matière d’immigration. Maintenant, ce ne sont plus uniquement les nationalistes québécois qui dénoncent ce projet messianique. En effet, depuis peu, une nouvelle voix se fait entendre pour remettre en question le bien fondé des seuils d’immigration toujours plus élevés chaque année : des chroniqueurs du Canada anglais qui parlent au nom d’une partie de la population.
C’est avec un certain étonnement que l’on peut lire que certains grands journaux du Canada anglais s’interrogent sur les capacités d’accueil des immigrants, leur intégration et la pression sur nos infrastructures, avec en tête le logement, les écoles et les hôpitaux. Nous avions déjà traduit un texte de David Green, professeur à la Vancouver school of economics et publié dans le Globe and Mail, qui expliquait en quoi l’immigration massive prônée par Justin Trudeau ne répond pas à la logique du libre-marché, et que c’est même néfaste.
Par exemple, il mentionne que les immigrés fraîchement arrivés sur le marché sont mis en compétition contre les nationaux, mais aussi les immigrants déjà présents ici, pour faire une pression à la baisse sur les salaires. De plus, le recours à une immigration massive rend les entreprises moins productives, qui sont moins incitées à investir dans la formation et le développement de nouvelles compétences chez les travailleurs. Avec son argument que la politique d’immigration est comme un marteau, et que chaque problème de société est un clou, c’est qu’on applique une seule politique à des problèmes qui sont beaucoup plus complexes.
Il avance que ce n’est pas le manque de travailleurs qui met en péril notre système de santé, mais plutôt la puissance des ordres professionnels qui versent dans le corporatisme. Tout comme l’argument évoqué qui affirme que les immigrants viennent travailler dans la construction pour répondre à la pénurie de logement. Alors que la crise du logement s’explique par un nombre massif de nouveaux arrivants dans nos villes, mais aussi par de riches étrangers qui voient nos villes comme une opportunité d’investissement. Et ce sans compter les administrations municipales qui ont des normes de construction rigides.
Après ce texte qui vise droit au but, le National Post a lui-aussi publié une chronique de Tristin Hopper, qui s’attaque à un autre angle des politiques d’immigration irréfléchies de Justin Trudeau. Cette fois-ci, ce n’est pas sous l’angle du libre-marché et des mécanismes de base en économie, mais plutôt sur la comparaison entre le passé et aujourd’hui. Il y a environ une centaine d’années, le Canada recevait autant d’immigrants que de nos jours, mais ceux-ci allaient coloniser des terres vierges dans le climat hostile de l’ouest canadien. Les questions du logement et des soins médicaux ne se posaient pas. Les gens devaient se débrouiller pour construire leur maison et se soigner. Car justement, il n’y avait rien dans les prairies. L’article affirme également que notre système de santé est sur le bord de l’implosion, et que nos loyers sont parmi les plus chers du monde. À un point tel ou un immigrant sur cinq souhaite déjà quitter le Canada pour aller voir ailleurs.
Évidemment, on souhaite mettre des gants blancs pour parler de ce sujet – vu comme étant particulièrement toxique au Canada anglais – en affirmant que l’immigration enrichit notre société, que les Canadiens sont parmi les gens les plus tolérants au monde. Dans la chronique de Tristin Hopper, on se permet même une pointe de Québec bashing ; le Québec n’aimerait pas les immigrants, alors que le Canada anglais en serait amoureux. Or, qu’est-ce que cela nous dit? Les Canadiens anglais commencent à s’interroger sur les conséquences de faire entrer l’équivalent de la population d’Halifax chaque année sans que les infrastructures ne suivent.
Le peuple Québécois est conscient du risque que pose une immigration voulue par le gouvernement canadien, pour notre culture, notre langue et notre avenir politique dans le Canada. Bien sûr, il y a aussi les arguments économiques en faveur d’une diminution de l’immigration. Le Canada anglais commence à se poser les questions d’ordre économique, mais vont-ils se demander si une trop grande diversité culturelle ne peut pas avoir des conséquences sur l’identité ‘’canadienne’’, tel que les Canadiens Anglais et les immigrés de longue date la conçoive. La question reste ouverte.