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Guy Millière | Rétrospective sur le 11 septembre 2001 et le nouveau fiasco en Afghanistan

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Guy Millière est géopoliticologue, senior fellow du Gatestone Institute et au American Freedom Alliance a Los Angeles et est également professeur à l’université de Paris VIII. Il est l’ancien président de l’Institut Turgot à Paris et économiste à la Banque de France. Il a publié 40 livres sur la France, l’Europe, les États-Unis, Israël et le Moyen-Orient. Il est l’auteur de milliers d’articles publiés en France, en Israël et aux États-Unis.

Q : Pourquoi les États-Unis ont été victimes d’attentats terroristes le 11 septembre 2001?

Les Etats-Unis ont été attaqués le 11 septembre 2001 parce qu’ils sont la principale puissance du monde occidental et que la guerre islamique contre le monde occidental, djihad, s’est enclenchée dès la naissance de l’islam.

Le discours islamique dit que l’islam doit régner sur le monde et que la population mondiale doit se soumettre à l’islam. En quelques décennies, les guerriers de l’islam ont, au septième et huitième siècle de notre ère, créé un immense empire, par la violence la plus sanglante. Cet empire s’est étendu encore au cours des siècles suivants. Il est allé, lors de son extension maximale, de l’Inde jusqu’à l’Espagne et au sud de la France. Il a entraîné des guerres de reconquête de peuples asiatiques et d’Européens.

L’empire de l’islam a changé de dirigeants plusieurs fois. Il a été arabe au commencement et dirigé par des Turcs dans sa dernière phase. Il n’a pu s’adapter à la modernité et aux innovations occidentales, et il a perdu du terrain. Il s’est effondré avec l’effondrement, puis le démantèlement de l’Empire ottoman au lendemain de la Première Guerre mondiale. L’islam a pu sembler vaincu. Il ne l’a pas été. Dans les années 1970, grâce aux chocs pétroliers, de l’argent a coulé à flots dans les caisses de plusieurs États musulmans, et des organisations islamiques ont décidé de repartir au combat contre l’Occident. al-Qaïda est l’une d’entre elles.

Le djihad est pratiqué par des guerriers de l’islam sur un mode conventionnel ne peut fonctionner dans l’ère contemporaine. La supériorité technologique occidentale est écrasante. Le terrorisme est devenu, à partir des années 1970, un moyen de djihad. Le terrorisme ne permet pas de victoire militaire à proprement parler, mais il sème la peur, et les guerriers de l’islam pensent que la peur peut conduire à la soumission. Frapper les Etats-Unis a pu paraître à Oussama ben Laden comme un coup de maître.

Non seulement il a frappé la principale puissance du monde occidental, mais il a frappé ce qui pouvait apparaître comme le principal centre financier de la principale puissance du monde occidental, le World Trade Center, et la matrice de sa défense militaire, le Pentagone. Le quatrième avion devait frapper le lieu du pouvoir politique, donc la Maison-Blanche ou le Capitole, on ne saura pas car des héros ont arrêté l’action terroriste et l’avion s’est écrasé avant d’avoir touché sa cible.

 Des gens de gauche à l’époque se sont demandé pourquoi al-Qaïda avait frappé les États-Unis, et plutôt qu’incriminer l’islam et le djihad, on dit que les États-Unis étaient fautifs, qu’ils avaient eu des actions impérialistes, qu’ils payaient pour la colonisation occidentale du monde musulman. C’est inexact, et pour dire cela il faut ignorer ce qu’est l’islam. Les puissances coloniales ont été essentiellement européennes. Les guerres impliquant les États-Unis après 1945 ont été des guerres contre l’avancée du communisme sur la surface de la planète, par des guerres contre l’islam. Oussama ben Laden a été très clair et a dit qu’il menait le djihad contre l’Occident. La guerre islamique contre l’Occident se poursuit et se poursuivra.

Q : Est-ce que l’administration de George W. Bush a mis en place une réforme des services de renseignements américains afin de prévenir d’autres attaques sur le sol américain?

Les attentats du 11 septembre 2001 ont été possibles parce que, sous la présidence de Bill Clinton, le risque terroriste islamique a été très gravement sous-estimé, mais aussi parce que, au nom de la protection de la liberté des citoyens américains et des personnes résidant aux États-Unis, des cloisons étanches ont été dressées, séparant les activités du FBI de celles de la CIA, qui n’ont plus échangé d’informations.

 Les terroristes ont pu venir aux États-Unis, suivre des cours de pilotage, et ils ont attiré l’attention du FBI qui, un temps, les a placés sous surveillance. En parallèle, la CIA avait des renseignements qui indiquaient qu’al-Qaïda préparait des attentats aux États-Unis, mais ces renseignements n’ont pas conduit à s’intéresser de plus près et sous l’angle du risque terroriste à des musulmans prenant des cours de pilotage.

Après les attentats, les cloisons étanches ont été supprimées, des moyens de recoupement entre les renseignements obtenus par la CIA et les enquêtes du FBI ont été mis en place. Cela a été au cœur d’une loi promulguée par le Congrès le 26 octobre 2001, le Patriot Act. Des mouvements de gauche ont dit que la loi portait atteinte à la liberté individuelle. 

Quand Barack Obama, homme de gauche, a été élu et est devenu Président, il ne l’a pas supprimée. Il a utilisé certaines de ses dispositions pour surveiller ses opposants politiques et a demandé aux dirigeants du FBI et de la CIA de ne plus orienter leurs activités vers le risque islamique, ce qui a permis à des islamistes de perpétrer des attentats sous sa présidence. Ces attentats ont été beaucoup moins graves que ceux du 11 septembre, mais ils ont coûté des vies.

Donald Trump s’est efforcé de réorienter les activités du FBI et de la CIA vers la prévention du risque islamique, et des attentats ont été évités. Même lorsqu’une loi est votée, son efficacité dépend de l’action et des décisions de ceux qui sont censés la faire appliquer.   Pour l’heure, aucun attentat majeur n’a eu lieu à nouveau sur le sol américain. Les désastreuses décisions de l’administration Biden concernant l’Afghanistan vont permettre aux organisations terroristes islamiques de disposer à nouveau d’une base arrière, et il est très loin d’être certain que ceux qui sont à la tête du FBI et de la CIA aujourd’hui sont à même d’agir efficacement contre le risque islamique.

Q : Quel bilan faites-vous de la politique étrangère de George Walker Bush après 9/11?

 C’est une question complexe. George Walker Bush a décidé de détruire les bases arrière d’al-Qaïda en Afghanistan et c’était une décision légitime. Il a décidé de renverser le régime taliban qui abritait et soutenait al-Qaïda. C’était aussi une décision légitime. Il a eu le projet de procéder à des changements de régime dans tout le monde musulman de façon à ce que les pays concernés s’occidentalisent et que leurs dirigeants et leurs populations renoncent au terrorisme.

C’était un projet imprégné d’idées nobles, mais utopique.  Renverser Saddam Hussein pouvait se justifier: le régime de Saddam Hussein était abominable et était devenu un régime islamiste. Vouloir faire de l’Irak un pays démocratique impliquait, comme en Afghanistan, d’y maintenir des forces américaines indéfiniment. Que des guerriers de l’islam s’en prennent aux forces américaines en Irak était logique.

À la fin de la présidence Bush, l’Irak était stabilisé, parce que l’armée américaine était toujours là, et parce qu’elle avait vaincu les guerriers de l’islam, mais il était évident que sitôt les forces américaines se retireraient, les guerriers de l’islam repartiraient au combat. C’est ce qui s’est passé. Fin 2011, Barack Obama a décidé de retirer les troupes américaines d’Irak, un groupe né d’al-Qaïda en Irak a vite pris de l’ampleur, a commencé à constituer ce qui s’est appelé l’État islamique, s’est doté d’un territoire, et est devenu une base de formation pour djihadistes.

L’armée américaine sous George Walker Bush n’est pas intervenue ailleurs qu’en Afghanistan et en Irak, et le projet de changements de régime dans le monde musulman et d’occidentalisation du monde musulman a glissé vers le révolu. Georges Walker Bush n’a pas été suivi par l’essentiel des dirigeants européens qui ont préféré une politique d’apaisement vis -à-vis du risque islamique, et cela a fortement contribué à l’échec du projet. Le bilan doit dès lors être nuancé. Il fallait détruire les bases arrière d’al-Qaïda et renverser le régime taliban.

Le renversement du régime de Saddam Hussein était justifiable. Le projet de changements de régime dans le monde musulman et d’occidentalisation du monde musulman était utopique et condamné à échouer, et ce projet a coûté des milliards de dollars. Cela dit, la diabolisation de George Walker Bush a été ignoble et honteuse et a permis l’élection d’Obama, qui a créé divers désastres: la déstabilisation islamique du monde musulman sunnite, la guerre civile en Syrie, l’instauration de l’État islamique en Syrie et en Irak, duquel est sortie une vague effroyable d’attentats en Europe, le renforcement du régime des mollahs en Iran, la prise en main du Liban par le Hezbollah, le glissement de la Turquie vers l’islamisme.

Les Européens ont adoré Obama, sans voir qu’il leur a apporté des attentats sanglants. Ils ont détesté Trump, qui a détruit l’État islamique et mis fin aux attentats sanglants. Ils ont été enthousiastes quand Biden a été installé au pouvoir. Biden a remis les talibans au pouvoir en Afghanistan, et al-Qaïda et d’autres organisations terroristes islamistes vont à nouveau disposer de bases arrière. Je ne sais si les Européens seront toujours satisfaits de Biden si des attentats sanglants ont à nouveau lieu en Europe.

Q : 20 ans après 9/11, les talibans sont de retour au pouvoir en Afghanistan, comment expliquer cela ?

L’explication est hélas très simple. Les talibans n’ont jamais renoncé à reprendre le pouvoir en Afghanistan. Ils ont toujours considéré que les gouvernements mis en place après l’intervention américaine et soutenus par les États-Unis étaient des gouvernements infidèles à l’islam et devaient être renversés pour que l’islam règne à nouveau sur l’Afghanistan. Sans présence militaire américaine, sans protection américaine du gouvernement afghan soutenu par les États-Unis, le retour des talibans au pouvoir était une certitude.  Donald Trump voulait mettre fin à l’intervention américaine en Afghanistan, mais il voulait le faire en maintenant une dissuasion destinée à éviter ce qui s’est passé. 

Il entendait laisser les tenants d’un islam strict revenir au pouvoir tout en leur disant qu’ils étaient sous surveillance des États-Unis, qui disposent de drones et de moyens de surveillance sans équivalents sur la surface de la Terre, et il avait énoncé des menaces précises que les chefs talibans avaient prises au sérieux. L’administration Biden a montré qu’elle était faible. Face à des barbares, la faiblesse est un encouragement.

Les talibans ont compris qu’ils ne risquaient rien s’ils passaient à l’offensive. Ils ont pu compter sur des soutiens de pays qui comprenaient qu’ils avaient tout à gagner d’une défaite américaine et du départ des États-Unis d’Afghanistan, le Pakistan et surtout la Chine et l’Iran. La débâcle provoquée par l’administration Biden a été si totale qu’on peut se demander si elle n’a pas été délibérée. Aucun dirigeant militaire ne peut prendre des décisions aussi débiles et criminelles que celles qui ont été prises, sans être folles ou animées de mauvaises intentions. 

Le résultat est une catastrophe sans précédent.  Biden devrait être destitué d’urgence. Le général Milley, chef d’état-major des armées et le général Lloyd Austin, ministre de la Défense devraient eux-mêmes être destitués et passer en Cour martiale. Cela ne se produira pas, hélas.

Q : Selon vous, est-ce que la présidence de George W. Bush a été positive pour le pays?

George Walker Bush a fait preuve de courage et de détermination après les attentats du 11 septembre.  Il a évité ce qui aurait pu, à l’époque, être un désastre pour le pays et pour le monde occidental. C’est un point essentiel. Il a infligé des défaites majeures à l’islam radical. C’est un autre point essentiel. Il a tenté de mettre en œuvre un projet utopique qui a été très coûteux, mais qui n’efface pas ce qu’il a fait de positif.

Il a été en 2001 l’homme qu’il fallait à la présidence des États-Unis. Il aurait sans doute été meilleur qu’il renverse les talibans, détruise al-Qaïda et renverse Saddam Hussein, sans poursuivre un projet utopique, mais nombre de gens à l’époque pensaient que le projet n’était pas utopique.  Il n’a pu arrêter la vague délétère qui a porté Obama au pouvoir, mais nul n’aurait pu, sans doute arrêter cette vague. Il n’a pu contrer la lâcheté de nombre de dirigeants européens, mais nul n’aurait pu parvenir à ce résultat.

Les dirigeants européens sont tout aussi lâches aujourd’hui que ceux de l’époque de George Walker Bush, qui vaut bien mieux qu’eux. George Walker Bush est resté silencieux pendant les années Obama et a été hostile à Donald Trump, un homme courageux lui aussi, ce qui fait qu’après sa présidence, George Walker Bush s’est abaissé, ce qui fait qu’il ne restera pas dans l’histoire comme un grand président.

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