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Jérôme Blanchet-Gravel: « Éric Duhaime doit faire la promotion de la droite intelligente »

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Entrevue avec Jérôme Blanchet-Gravel sur l’émergence du Parti conservateur du Québec

Simon Leduc : Comment avez-vous trouvé la dernière performance d’Éric Duhaime à l’émission Tout le monde en parle ?

JBG : Nous avons vu un Éric Duhaime très calme, très posé, et en parfaite maîtrise de ses dossiers. C’est un succès pour lui sur le plan de la communication. Il fallait s’y attendre : son passage a pris la forme d’un procès auquel ont participé l’animateur et presque tous les autres invités, mais il a bien su assurer sa défense. Il l’a fait en toute sobriété. Dans ce contexte, les plus critiques du confinement seront peut-être restés sur leur appétit, mais d’autres tribunes offriront l’occasion au nouveau chef de se montrer plus bagarreur.

Simon Leduc : Selon vous, le Parti conservateur du Québec va-t-il devenir une force politique dans les prochaines années ?

JBG : Cette perspective dépend évidemment de plusieurs facteurs, à commencer par le temps qu’il reste au confinement et aux mesures sanitaires en tout genre. Le gouvernement Legault sera-t-il forcé de déconfiner sous la pression des États américains libérés, ou souhaite-t-il déjà faire de la prochaine élection une sorte de référendum sur la « sécurité sanitaire » des Québécois ? Ou, plus simplement, miser sur ce qu’il voit comme une performance exceptionnelle de sa part dans sa gestion de la pandémie ? Dur à dire.

Si le gouvernement Legault s’entête à faire du Québec un leader mondial du risque zéro, alors là, il est clair que Duhaime pourrait rapidement faire du PCQ un véritable parti émergent. Il faut aussi souligner que la fin des mesures ne voudra pas dire la fin des blessures. De même, le virage sécuritaire et confortable entrepris par le Québec pourrait prendre d’autres formes que la sanitaire. On pourrait être tenté d’offrir encore plus de garanties via l’État à des citoyens manifestement de plus en plus anxieux. L’État fédéral pourrait aussi jouer un rôle dans tout ça : vers une extension du domaine de la PCU ?

Il faut bien comprendre que la crise sanitaire n’a fait que renforcer une tendance lourde et peu reluisante du Québec : son rapport difficile au risque et à l’adversité, rapport à la limite de l’intolérance. Ce sont maintenant de grandes visions d’ensemble de la société qui s’affrontent : il ne s’agit pas seulement d’un débat sur le confinement et la vaccination, mais d’une discussion sur le genre de société dans lequel nous voulons vivre.

Rappelons quand même que le programme d’Éric Duhaime est loin de se limiter à la question sanitaire. Il s’est surtout fait connaître sur des questions économiques et le Québec post-pandémie pourrait rester englué dans son petit confort hostile à un développement digne de ce nom. Par contre, il est clair qu’un déconfinement plus précoce qu’on ne pourrait le croire ne l’avantagerait pas à la prochaine élection.

Simon Leduc : Que doit donc faire le chef pour faire avancer son parti ?

JBG : Éric Duhaime doit continuer à renforcer la crédibilité de son parti auprès des électeurs peu habitués à une vision plus américaine du libéralisme. Au Québec (et ailleurs), la droite n’a pas bonne réputation en général et pour s’imposer dans l’espace public, il lui faut toujours faire fi des insultes qui lui sont proférées par les bien-pensants. En revanche, on voit que la question sanitaire a tendance à transcender les vieux clivages. Chose incroyable : des ex-solidaires pourraient se retrouver à militer au PCQ.

L’avancement du parti passera aussi par le recrutement de bons candidats pour la prochaine élection et je pense, le développement d’une image plus « intellectuelle ». Non pas qu’Éric Duhaime ne soit pas un intellectuel, – il en est un –, mais il devra peut-être œuvrer à casser la caricature qui fait de tous les gens de droite des amateurs de calendriers de filles à poil ou des « édentés » sans éducation. C’est un cliché très tendance. Éric Duhaime doit faire la promotion de la droite intelligente. 

Simon Leduc : Est-ce que le chef du PCQ doit présenter aux Québécois un solide programme nationaliste ?

JBG : Lors du lancement de sa campagne à la chefferie du parti, Duhaime s’est déjà rangé dans le camp du nationalisme. Sur la question identitaire, je pense qu’on peut s’attendre à ce que le PCQ adopte des positions proches de celle de la CAQ, ce qui serait cohérent sur le plan électoral et idéologique.

En revanche, le parti ne gagnerait rien à développer un discours creux et angélique sur la nation qui aurait tendance à nier les problèmes que nous avons vu être amplifiés par la pandémie. Que ces problèmes soient de nature sociale (mépris des liens sociaux et familiaux/égocentrisme exacerbé des Baby-Boomers) ou économique et organisationnelle (syndicalisme et corporatisme systémiques/faillite du système de santé). Durant la crise, la plupart des chroniqueurs nationalistes ont fait abstraction de grands malaises comme celui engendré par la défense du port du masque chez les enfants pour tenter de préserver l’image d’un Québec tricoté serré et solidaire (un mythe aujourd’hui). En bref, Duhaime doit être un nationaliste plus réaliste que romantique.

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