Dans l’ensemble du monde occidental – que ce soit en Amérique du Nord, en Europe ou dans certaines sociétés d’Asie développée comme le Japon ou la Corée du Sud – la natalité s’effondre. Ce n’est plus un simple phénomène statistique ou une curiosité sociologique : il s’agit d’un bouleversement civilisationnel aux conséquences potentiellement dramatiques. La disparition lente mais assurée de certains peuples n’est plus un fantasme apocalyptique. C’est un scénario que des démographes, des économistes et des penseurs prennent aujourd’hui au sérieux.
Certes, la baisse de la natalité est un phénomène mondial. Mais elle est particulièrement aiguë dans les sociétés qui ont épousé le plus radicalement les idéaux du libéralisme sociétal : l’individualisme triomphant, la primauté de l’épanouissement personnel, la remise en question des structures familiales traditionnelles, et l’atomisation de la vie collective. L’enfant n’est plus vu comme une richesse ou une promesse, mais souvent comme un fardeau, une entrave à la liberté personnelle ou une « charge financière ».
Peut-on réellement dissocier la chute de la natalité occidentale des transformations culturelles profondes qui ont accompagné le tournant post-1968 ? L’avènement du féminisme radical, la glorification de la carrière au détriment de la maternité, l’effondrement de la religion, la perte de repères stables, l’extension de la consommation hédoniste à tous les aspects de la vie : autant de tendances qui ont redéfini la norme. Faire des enfants n’est plus considéré comme une responsabilité sociale, mais comme un choix strictement privé – voire comme une excentricité.
Des penseurs comme Guillaume Faye, dans sa théorie de l’archéofuturisme, ont tenté de proposer une voie de sortie. Selon lui, il faut combiner l’héritage immémorial des peuples – leurs racines, leurs mythes, leurs identités profondes – avec les avancées scientifiques et techniques du futur. Ce n’est donc pas un retour à un passé idéalisé qu’il propose, mais une synthèse nouvelle, où la tradition reprend une fonction structurante, dans un monde réenchanté et technologiquement avancé.
Ce modèle heurte frontalement l’idéologie dominante, mais il pose une question essentielle : peut-on survivre collectivement sans projet commun, sans transmission, sans enfants ? La réponse semble de plus en plus évidente. Derrière la rhétorique de la liberté et du progrès se cache peut-être un nihilisme mou, qui dissout toute volonté de perpétuation.
Il ne s’agit pas de condamner la modernité en bloc. Mais il faut avoir le courage de reconnaître que certaines avancées – qu’elles soient technologiques, culturelles ou morales – ont un coût. Et si ce coût, c’était la disparition même de ceux qui les ont rendues possibles ?