Dans un article publié le 10 juin 2025 dans le National Post, le chroniqueur Anthony Koch signe un réquisitoire lucide, implacable et profondément inquiet sur la transformation du lien civique au sein des sociétés occidentales, et plus particulièrement au Canada. Intitulé « The commodification of citizenship and the downfall of western civilization » (La marchandisation de la citoyenneté et le déclin de la civilisation occidentale), son texte dénonce la dérive technocratique qui réduit la citoyenneté à une carte d’accès aux services, et la nation à une entreprise gérée selon des indicateurs de croissance plutôt qu’un peuple enraciné dans une culture, une mémoire et une histoire commune.
La citoyenneté comme abonnement, la nation comme marque
Anthony Koch observe d’emblée que l’Occident a commis une « erreur philosophique majeure » en remplaçant la vision civilisationnelle de la nation par une logique commerciale. Ce glissement n’est nulle-part aussi évident, selon lui, qu’au Canada, où l’identité nationale a été graduellement dissoute dans un bain d’indicateurs économiques et de slogans abstraits comme « la diversité, c’est notre force » ou « l’immigration est le moteur du PIB ». La patrie devient alors un brand à vendre sur la scène mondiale, et le citoyen un consommateur fidèle parmi d’autres.
Cette marchandisation de l’appartenance civique, écrit Koch, entraîne un profond appauvrissement du sens collectif. Ce n’est pas simplement une erreur de politique publique : c’est une faute morale. On ne fonde pas une nation sur des tableurs Excel, pas plus qu’on ne demande à un peuple de se battre ou de se sacrifier pour un taux de croissance.
Le multiculturalisme d’État comme rupture symbolique
Le Canada, rappelle Koch, fut le premier pays au monde à faire du multiculturalisme une politique officielle. Mais ce choix, loin de se limiter à la tolérance ou au pluralisme, s’est transformé en idéologie d’État. Le multiculturalisme n’est plus un constat démographique, mais un programme gouvernemental qui célèbre toutes les cultures, sauf celle qui a forgé les institutions du pays.
L’auteur dénonce un double standard implicite : les immigrants sont invités à conserver langues, coutumes et traditions d’origine, alors que la majorité historique — les Canadiens d’ascendance euro-chrétienne — est poussée à se désidentifier de son héritage, à le considérer comme un fardeau à expier plutôt qu’un legs à transmettre. La culture majoritaire devient un champ de ruines, alors que toutes les autres bénéficient de subventions, de journées thématiques et de programmes de célébration.
Inclusion sans intégration, croissance sans cohésion
Dans un passage particulièrement fort, Anthony Koch établit le lien entre immigration de masse, effondrement de la cohésion sociale, crise du logement et montée du sentiment d’aliénation. Les objectifs migratoires s’empilent année après année, comme des cibles de rendement dans une campagne de marketing, sans que le pays se donne les moyens matériels ou culturels de les absorber. La citoyenneté est accordée sans vraie exigence de langue, de loyauté ou de connaissance du pays — pourvu que l’on paie ses impôts.
Mais, prévient-il, « inclusion sans intégration n’est pas unité — c’est fragmentation ». Le modèle actuel repose sur une forme de relativisme bureaucratique, dans lequel les cultures cohabitent sans se rencontrer, et où le sentiment d’appartenance s’effrite sous le poids du soupçon permanent d’intolérance ou de nostalgie déplacée. À ceux qui s’interrogent sur ce qu’il reste de leur pays, on oppose des statistiques de croissance ou des accusations de privilège.
Un mal commun à l’ensemble de l’Occident
Koch élargit ensuite sa critique à l’ensemble du monde anglo-saxon, où la déconstruction de l’identité nationale suit des chemins similaires : au Royaume-Uni, la culture anglaise s’est effacée derrière une façade de royauté aseptisée et de valeurs civiques vides ; en Australie, les racines mythiques du Dreaming ont été remplacées par des discours de productivité ; aux États-Unis, le patriotisme est soit théâtral, soit honteux, selon l’endroit où l’on vit.
Mais c’est au Canada, affirme-t-il, que cette logique atteint son point culminant, en combinant la froideur administrative de l’État-nation postmoderne avec une incapacité à définir un bien commun qui dépasse le marché.
La nation comme mémoire, non comme service
La conclusion de l’article d’Anthony Koch se fait vibrante, presque testamentaire : une nation, écrit-il, n’est pas une zone économique ni un département des ressources humaines. C’est une maison, un récit, une chaîne de mémoire qui relie les vivants aux morts et aux enfants à naître. Si la culture se réduit à des plats et la citoyenneté à un formulaire, la société s’effondre sous son propre vide symbolique.
Pour le chroniqueur du National Post, il est urgent que le Canada se souvienne de ce qu’il est — ou il cessera simplement d’être quoi que ce soit. Ce rappel résonne comme un cri du cœur dans un pays où l’identité semble trop souvent traitée comme une variable gênante dans un tableur ministériel.
Crédits : Cet article est une synthèse critique du texte « The commodification of citizenship and the downfall of western civilization » publié le 10 juin 2025 dans le National Post par Anthony Koch, à qui tous les propos et arguments originaux doivent être attribués. Le National Post demeure la source exclusive de l’article original.