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Un opioïde 40 fois plus puissant que le fentanyl entre au Canada caché dans des PlayStation et des ballons

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D’après un article d’Eric Szeto, Jordan Pearson et Ivan Angelovski publié sur CBC News le 20 juin 2025

Le Canada fait face à une crise émergente de drogues encore plus meurtrières que le fentanyl. Les journalistes Eric Szeto, Jordan Pearson et Ivan Angelovski de CBC News révèlent qu’un opioïde synthétique, le nitazène, jusqu’à 43 fois plus puissant que le fentanyl, est introduit au pays dans des objets aussi anodins que des consoles PlayStation, des ballons dégonflés ou des boîtes de tisane.

Dans une enquête approfondie, réalisée avec l’aide du groupe Bellingcat, les journalistes ont contacté 14 vendeurs après avoir repéré des centaines d’annonces publiées ouvertement sur LinkedIn, X (anciennement Twitter), Reddit, Behance (Adobe), et même des plateformes de commerce électronique indiennes comme Exporters India, Dial4Trade ou TradeIndia. Ces vendeurs n’hésitaient pas à proposer leurs produits mortels directement, certains en affichant leur numéro de téléphone sur les images.

Un vendeur contacté par téléphone, se présentant sous le pseudonyme de Kim, expliquait sans détour vendre de la cocaïne, de la méthamphétamine, de la MDMA et du nitazène. Lorsqu’un journaliste de CBC lui demande si cette drogue peut tuer, Kim répond simplement : « C’est le jeu. »

Les nitazènes, jamais approuvés à des fins médicales, sont classés dans l’annexe 1 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Pourtant, ces substances ont été retrouvées dans des milliers de faux comprimés d’oxycodone saisis lors de perquisitions, notamment deux saisies majeures au Québec l’an dernier. Selon la GRC, elles pourraient représenter plus d’un million de pilules contrefaites.

Les conséquences sont tragiques. Christian Boivin, de Montréal, a perdu son fils Mathis, 15 ans, qui croyait consommer de l’oxycodone. « Ces vendeurs n’ont pas de conscience. Ce sont de mauvaises personnes. Ils s’en foutent des vies. »

CBC a compilé les données obtenues auprès de bureaux de coroners dans les treize provinces et territoires. Même si certains n’ont fourni que des données partielles — le Manitoba, par exemple, n’a fourni que celles de 2024 — près de 400 décès liés aux nitazènes ont été recensés depuis 2021. La majorité en Alberta (121), suivie du Québec (91) et de la Colombie-Britannique (81). Mais le véritable nombre pourrait être bien plus élevé. « Si vous ne les cherchez pas, vous ne les trouvez pas », explique Donna Papsun, toxicologue judiciaire du laboratoire NMS Labs en Pennsylvanie, qui analyse des échantillons canadiens.

Le directeur général du renseignement et des enquêtes à l’Agence des services frontaliers du Canada, Dan Anson, souligne : « On craint que cette menace continue de croître. » Selon lui, le marché fonctionne actuellement presque entièrement via les petites annonces en ligne. Des vendeurs expliquent en détail comment ils masquent les expéditions : en fausse tisane, dans des boîtes de PlayStation, de la nourriture pour chien, ou des articles ménagers.

CBC a aussi mis en lumière l’existence d’un vaste réseau mondial. Certains vendeurs se disent basés au Royaume-Uni, aux États-Unis, en Inde, aux Philippines, ou en Chine. Un vendeur chinois, se présentant sous le nom de Jerry, a avoué avoir utilisé une fausse adresse à Shanghai pour éviter les autorités chinoises : « C’est très dangereux de vendre en Chine », confie-t-il.

Plus inquiétant encore : certains vendeurs montrent des vidéos de leurs laboratoires, avec le nom du journaliste de CBC et la date à l’écran pour prouver l’authenticité. D’autres offrent même des échantillons gratuits. Une entreprise indienne a reconnu profiter des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine pour se positionner comme fournisseur de substitution.

Dale Sutherland, de Toronto, dont le fils Corey est mort à 22 ans d’une surdose impliquant du nitazène, exprime son désespoir : « Ces gens-là s’en foutent du nombre de morts ou des familles détruites. Il faut des règlements plus stricts. »

Kevin Brosseau, surnommé le « tsar du fentanyl » au Canada, a réagi en déclarant que la montée des nitazènes est prise « très au sérieux ». Il cite le projet de loi C-2, aussi appelé Loi sur les frontières solides, qui donnerait à Postes Canada davantage de pouvoir pour inspecter les colis. Or, cette loi suscite la controverse : plus de 300 groupes de la société civile réclament son retrait, la qualifiant d’atteinte aux libertés civiles.

Pendant que des vendeurs de mort se multiplient sur les plateformes numériques, que les algorithmes publicitaires n’y voient que du feu, et que les douanes sont contournées avec une créativité redoutable, une chose est claire : la guerre contre les opioïdes ne fait que commencer. Et le Canada est loin d’être prêt.

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